Hom Nguyen : Anh ta giấu mặt

Hom Nguyen : Anh ta giấu mặt

Le temps d’un instant, une culture, le Hip-hop,  s’est constituée en non-système. Culture dans laquelle le geste est aussi rapide que le son (Sound system) : geste du tagueur qui griffonne un signe ; geste du M.C qui déparle et laisse couler des flots saccadés, concassés de paroles. Hom Nguyen vient de là. Ses débuts se sont faits sur le terre-terre, rollers aux pieds, TKC CREW au dos, et l’ont amené – après s’être arrêté un temps dans la patine de souliers en cuirs – en galerie.

Que de portraits ! Hom Nguyen expose, dans un lieu de plus de 500 m2, trois séries de portraits peints ces dernières années et une série d’autoportraits : Trajectoire (2017), Ligne de vie (2017), You Man (2018) et Hidden (2015). Gribouillons de visages, les lignes violentes de Nguyen glissent sur le tableau. Ces lignes assurées sont autant de moyens d’échapper aux trajectoires attendues, à l’image de ces autoportraits où l’artiste cache son visage probablement pour opérer une « désidentification » afin d’échapper à l’identification imposée de l’extérieur. Intitulée Hidden, cette série pourrait aussi s’intituler Đi chốn, soit, « se cacher » en vietnamien. Car il s’agit pour cet artiste, dont les parents ont fui la guerre au Vietnam, de reconstituer une identité à partir de bouts de restes de la guerre, de migrations, d’histoires tues, d’identités éclatées, de souffrances et de douleurs à jamais inconnues. Et cette reconstitution, il la réalise notamment dans sa série Ligne de vie (2017). Des bouts de visages émergent, probablement de l’oubli, et viennent de l’autre côté des coupures opérées par les guerres et la colonisation ; de l’autre côté de la « coupure radicale » (pour reprendre un terme d’Edouard Glissant), de l’autre côté des Eaux. Et ces visages, ces regards donnent l’impression qu’il n’y a jamais eu de coupures. Qu’il n’y a jamais eu de puzzle à reconstituer, d’identité à re-fabriquer mais seulement des « lignes de vies » qui tant bien que mal se poursuivent, malgré les cassures, malgré les guerres, malgré les gouffres immenses. Les lignes de Hom Nguyen dérivent, elles partent, elles n’ont aucun itinéraire, elles changent, se modifient et flottent. Violents et rebelles, ces flows, ces freestyles sont, à l’image de la culture Hip-Hop, d’authentiques mouvements de transgressions contre la fixité de la figuration. Sur la terre rassurante qu’est l’instrumentale en musique, le rappeur laisse couler des flots discontinus, continuellement changeant qui vont d’un point à un autre. Ces lignes crayonnées font vibrer toute identité fixe et dessinent à l’inverse une identité furieusement plurielle, identité qui part et de la France, et du Vietnam, pour se déperdre et se retrouver dans le limon des humanités rencontrées.

Texte Chris Cyrille © 2018 Point contemporain

 

Hom Nguyen,
Né à Paris en 1972.
Représenté par A2Z Art Gallery Paris Hong Kong.

http://hom-nguyen.com

 

Hom NGUYEN, série Ligne de vie. Courtesy artiste et A2ZART Gallery.
Hom NGUYEN, série Ligne de vie. Courtesy artiste et A2Z ART Gallery.

 

Hom NGUYEN, série Ligne de vie. Courtesy artiste et A2ZART Gallery.
Hom NGUYEN, série Ligne de vie. Courtesy artiste et A2Z ART Gallery.

 

Hom NGUYEN, série Hidden, Autoportrait Mizaru. Techniques mixtes sur toile, 140 x 180 cm. Courtesy artiste et A2ZART Gallery.
Hom NGUYEN, série Hidden, Autoportrait Mizaru. Techniques mixtes sur toile, 140 x 180 cm. Courtesy artiste et A2Z ART Gallery.

 

Hom NGUYEN, série Inner cry. Courtesy artiste et A2ZART Gallery.
Hom NGUYEN, série Inner cry. Courtesy artiste et A2Z ART Gallery.

 

Visuel de présentation Hom Nguyen © Emmanuel Nguyen Ngoc