Matthieu Martin, Winter Palace, Galerie ALB

Matthieu Martin, Winter Palace, Galerie ALB

En direct de l’exposition Winter Palace, exposition personnelle de l’artiste plasticien Matthieu Martin.

Exposition : Winter Palace, du 5 septembre au 17 octobre 2015, galerie ALB Anouk Le Bourdiec, 47 Rue Chapon, Paris

Artiste : Matthieu Martin, né en 1986 à Bayeux, vit et travaille à Berlin. Diplômé de l’ESAM de Caen, et du Sheridan College of Art de Toronto.

Propos de Matthieu Martin recueillis le 12 septembre 2015 :

« Winter Palace est un projet qui a plusieurs années. J’ai visité tous les grands musées, d’abord en Europe puis dans le monde. En les parcourant, je me suis rendu compte de la présence que pouvaient avoir les dispositifs de protection des œuvres et surtout de la manière dont ils réduisaient considérablement mon expérience, et celle des visiteurs, avec les œuvres. Étant très curieux, j’aime voir parfois de très près les œuvres, le matériau, la touche, la texture et même parfois la manière dont les œuvres sont accrochées.

Matthieu Martin, Principe de précaution - Winter Palace, Feutres sur papier, 223 x 186 cm, 2015 ©galerie ALB
Principe de précaution – Winter Palace, Feutres sur papier, 223 x 186 cm, 2015 ©galerie ALB

J’ai commencé à répertorier les formes de ce que j’ai appelé plus tard les principes de précaution et en documenter par la photographie l’existence. Au fur et à mesure, dans une pratique quotidienne, je les ai redessinés et juxtaposés comme ici dans l’exposition. C’est de cette juxtaposition qu’est née l’idée des grands formats car en mettant les feuilles côte-à-côte, les espaces entre chaque dessin structurent l’ensemble. Au lieu d’utiliser pour un très grand format une unique grande feuille, j’ai préféré utiliser plusieurs feuilles de format A2 juxtaposées. Ainsi l’idée d’espace est mieux rendue et il s’ajoute l’idée de la fragilité, de la finesse représentée par ces petites cordelettes du système de précaution très légèrement distendues qui courent de feuille en feuille. Cela donne un rythme au dessin que l’on retrouve dans le tracé lui-même.

J’aime que chaque élément du dessin soit pris en compte, et dans ces travaux le support l’est autant que le dessin.

Avec le principe de précaution, on est dans un entre-deux, on nous prive de quelque chose, une sécurité abusive, on est dans la retenue et dans l’étape suivante. L’accident n’est pas arrivé, et il n’arrivera peut-être jamais. On est dans l’idée de la précaution qui est vraiment dans l’air du temps. On est dans l’anticipation. Plus qu’une critique au premier degré, je préfère y voir quelque chose de très silencieux et c’est pour cela que je l’associe à l’absence. Je ne préfère rien dire que de tout dire. C’est une dialectique que j’ai utilisé dans le livre Cover Up(1) qui parle du graffiti effacé, de son absence qui au final le révèle. Il y a cette idée que l’absence de l’œuvre la rend présente, la révèle.

Matthieu Martin, Principe de précaution - Centre Pompidou Feutres sur papier, 185 x 135 cm, 2015 ©galerie ALB
Principe de précaution – Centre Pompidou
Feutres sur papier, 185 x 135 cm, 2015 ©galerie ALB

Il est possible en décryptant la manière dont les dispositifs sont réalisés, en l’absence des œuvres qu’ils protègent, de mieux se rendre compte de certains détails. Ainsi l’importance des dispositifs sont directement liés à la valeur des œuvres. Et on voit bien qu’il y a tout un jeu de surenchère. Mon travail est entièrement documenté, c’est à dire que sur chaque dessin est mentionné le titre de la série « Principe de précaution », le lieu d’où il vient et l’année de la prise de vue sans toutefois préciser le titre de l’œuvre.

Ces travaux sur les principes de précaution parlent de ce qui nous conditionne.

On retrouve aussi dans mes dessins l’idée de parcours et de mobilité, qui est liée à ma vie. Les dessins ne sont pas cadrés, il y a des points de fuite afin qu’on puisse s’évader de l’image, tout cela est fondamental pour moi. Car après avoir fait les Beaux-Arts de Caen et un semestre à Toronto au Canada, j’ai décidé de ne plus avoir d’atelier et j’ai commencé à beaucoup voyager.

Matthieu Martin, Principe de précaution - Alte National galerie Feutres sur papier, 185 x 135 cm, 2015 ©galerie ALB
Principe de précaution – Alte National galerie
Feutres sur papier, 185 x 135 cm, 2015 ©galerie ALB

L’installation est un pendant des dessins. L’idée est d’utiliser les caractéristiques fortes du dessin comme les tensions entre les lignes fines et les lignes marquées, et de traduire cela en sculpture. J’ai créé une barrière qui vient rompre l’espace. J’aimerai pouvoir présenter ce type d’installation dans des institutions pour venir perturber l’ordre. Ce travail vient vraiment de ma propre relation à l’espace du musée car je visite beaucoup d’expositions. Le musée devrait être normalement un lieu ouvert, je le rêve ainsi.

(1) Matthieu Martin, Cover Up, préface de Denis Riout, éditions Rouge Inside, 2014.Disponible à la vente à la Galerie ALB, 47 rue Chapon, Paris 03

Pour en savoir plus : matthieumartin.fr
galeriealb.com