JOHANNA MARIE SCHIMMING

JOHANNA MARIE SCHIMMING

Johanna Marie Schimming, 139, (détail) 2019. Acrylique sur toile, 100 x 80 cm

ENTRETIEN / Johanna Marie Schimming à l’occasion de son exposition personnelle du 11 février au 1er mars 2020, Galerie Louchard, Paris
par François Beauxis-Aussalet 

 Johanna Marie Schimming, quel est votre parcours ?

J’ai toujours oeuvré entre l’art et le design. Inscrite aux Beaux-Arts de Rome, j’ai gagné en même temps un concours de bourse d’études en stylisme au sein de l’Istituto Europeo Di Design Roma. 

J’ai laissé cette occasion décider pour moi en croyant que ce serait plus facile et plus réaliste de vivre du design, plutôt qu’exclusivement de l’art. Forte en dessin, j’ai embrassé le métier de styliste de broderie haute couture. Inscrite dans cet univers et de ce savoir-faire artisanal, j’ai présenté précédemment des oeuvres d’art dans des expositions d’art textile en France et en Italie. La peinture abstraite est pour moi une pratique compensatrice vitale au dessin minutieux et figuratif, elle occupe aujourd’hui la place la plus importante dans ma vie.

Comment vous définissez-vous comme artiste ?

Je suis une peintre abstraite avec une tendance au minimalisme. Je recherche l’essentiel, un équilibre complexe entre vide et matière. 
Peu de gestes, mais forts et décidés, spontanés ou mûrement réfléchis. 
Une question que je me pose souvent : que rajouter sans affaiblir ?

Quelle est votre proposition artistique ?

Le rôle de l’art est avant toute chose de proposer une vision singulière et de transmettre des émotions. 

Beaucoup d’artistes, musicien, écrivains, peintres… utilisent leur propre souffrance comme matière première à leurs créations, pour a minima rendre leur vie supportable et accoucher dans le meilleur des cas, d’une oeuvre sublime. En ce qui me concerne la souffrance n’est pas mon moteur en peinture. Quand quelque chose me perturbe, m’agace ou m’attriste, je me défoule plutôt sur le piano, en jouant par exemple des passages très rapides d’un oeuvre de Rachmaninov. Je ne peins qu’une fois bien avec moi-même, centrée, concentrée, curieuse et disponible, avec, au contraire, l’intention d’offrir le meilleur de moi. Mon but n’est pas d’attirer l’attention en dérangeant ou en cherchant à être subversive. Ma recherche est personnelle. Je cherche avant tout une expression authentique : je propose ma perception, mes émotions, avec l’intention d’exprimer et partager harmonie, intégrité, profondeur, beauté et vitalité.

Quels sont vos rapports avec le public ?

Ce que j’aime dans l’abstrait c’est qu’il est généreux. Il laisse de l’espace à l’imagination des spectateurs aussi. J’observe qu’il y a un aspect de l’oeuvre que presque tous ressentent de la même façon, ce que je dévoile de moi, de mes états d’âme, puis il y a une part que chacun interprète selon ce qu’il aime, ce qu’il connaît et reconnaît et ce dont il a besoin. Ainsi, je ne donne pas de titres autres que la numérotation du catalogue des oeuvres, car je ne souhaite pas influencer l’interprétation du tableau par le spectateur avec un titre explicite. Au contraire, je souhaite que chacun puisse s’approprier mes tableaux à sa façon. 

Quelles sont vos influences ? 

Entre les artistes connus qui m’émeuvent le plus et dont j’observe la même envie de geste ou une recherche similaire comptent Gerhard Richter, Hans Hartung, Joan Mitchell, Cy Twombly, Pierre Soulages, ou encore Olivier Debré, Jus Juchtsman, Francesco Guerrieri (la série des tableaux lumière !) et André Marfaing. Ma technique est proche de celle de Gerhard Richter, un des artistes qui m’a certainement le plus influencée, et avec qui je partage d’ailleurs la même ville d’origine en Allemagne: Dresde ! J’ai par contre une approche plus minimaliste, épurée, par l’importance que j’accorde au vide et à sa relation avec le geste.

Comme artiste quel est votre défi ?

Le défi est de ne pas s’accrocher à son intention mais de rester ouvert à tout moment et de s’abandonner là où la peinture nous amène. Je commence chaque tableau d’abord avec une intention, puis c’est l’intuition qui me guide. Ce qui m’intrigue dans ma manière de peindre c’est qu’il y a un côté laissé au hasard aussi, que je ne maîtrise pas entièrement. C’est même le moment qui me procure le plus d’émotion, qui me permet de me sentir complètement présente et vivante ! parfaitement centrée sur l’instant, à interagir avec ce qui se passe sur la toile. Je le ressens comme un dialogue de création. Un dialogue entre mon désir et celui, disons, de l’univers. Peut-être c’est ce côté, qui me fait sentir que j’offre une chose plus grande que moi, et pas juste un objet produit prévisible, parfaitement maîtrisé. Une quête personnelle c’est aussi de peindre la joie, sans perdre son caractère sérieux et profond.

Un dernier mot ?

L’art a ce pouvoir magique d’émouvoir profondément. Cet échange de belles émotions, la joie que je ressens dans l’acte de peindre, puis les émotions que mes peintures provoquent chez les spectateurs, et en retour la grande émotion pour moi de voir les gens sincèrement touchés par ma peinture, créent le cercle parfait qui me motive le plus à poursuivre ma quête.

François Beauxis-Aussalet 

Johanna Marie Schimming, 139, 2019. Acrylique sur toile, 100 x 80 cm
Johanna Marie Schimming, 139, 2019. Acrylique sur toile, 100 x 80 cm
Johanna Marie Schimming, 98, 2019. Acrylique sur toile, 80 x 60 cm
Johanna Marie Schimming, 98, 2019. Acrylique sur toile, 80 x 60 cm
Johanna Marie Schimming, 146, 2019. Acrylique sur toile, 80 x 60 cm
Johanna Marie Schimming, 146, 2019. Acrylique sur toile, 80 x 60 cm
Johanna Marie Schimming, 143, 2019. Acrylique sur toile, 100 x 80 cm
Johanna Marie Schimming, 143, 2019. Acrylique sur toile, 100 x 80 cm

Johanna Marie Schimming
Née à Dresde, en Allemagne en 1988.

www.johannamarieschimming.com