[FOCUS] Les Frères Ripoulain, Gabion de friche

[FOCUS] Les Frères Ripoulain, Gabion de friche

Focus sur l’oeuvre Gabion de friche du duo d’artistes plasticiens Les Frères Ripoulain.

Oeuvre : Gabion de friche, galets et déchets, 2015

Exposition : Couleur globale, exposition du 28 août au 10 octobre 2015 sur invitation de la Straat galerie, 17 rue des Bergers, 13006 Marseille, à l’issue de la résidence artistique des Frères Ripoulain à Marseille en août 2015.

Artistes : Les Frères Ripoulain alias David Renault, né en 1979, vit et travaille à Rennes (FR) et Mathieu Tremblin, né en 1980, vit et travaille à Arles (FR) duo formé en 2006 à Rennes (FR).

Propos recueillis le 29 août 2015 lors de la Nuit des Galeries à l’occasion d’Art-O-Rama, Salon International d’Art Contemporain et de PARÉIDOLIE Salon International du Dessin Contemporain :

« Le gabion est un élément de construction, d’aménagement du territoire que l’on retrouve dans les nouveaux quartiers, sur les bords de route, autour des rivières. La nature y est comme mise en cage.

Alors que la tendance est à l’hygiénisation du territoire, notre volonté est de réintroduire du sauvage, de mettre sous grillage une réalité urbaine qui est celle de l’omniprésence des déchets. Ce travail pourrait être, ironiquement, prospectif car les déchets ne vieillissent pas quand ils sont conservés ainsi. Et, par leur quantité, ils pourraient en effet remplir les gabions et devenir dès lors un nouveau matériau de construction, agglomérés au béton. Cette oeuvre est une réflexion sur le capitalisme appliqué à l’urbanisme et de manière plus ouverte sur l’Anthropocène, l’écosystème terrestre façonné par l’homme depuis la révolution industrielle du XlXe.

Nous voulons poursuivre le projet en faisant un gabion de gravats et construire une forme architecturale avec ce procédé. C’est une forme de poétique, à la fois brutale et violente qui vient de ces territoires en marge où nous aimons aller. Un travail où les registres se confrontent : archéologie urbaine, utopie, uchronie. Nous investissons les terrains vagues qui sont des contre-formes de la ville. Gilles Clément parle à leur propos de tiers-paysage(1) des zones dont le biotope, lié à l’abandon, est plus diversifié que celui qui resterait par exemple sur des terres cultivées à outrance. Le déchet fait pleinement partie de cette nouvelle nature. Il cohabite avec la vie sauvage et les pratiques de marge.

Dans ces zones, nous accédons à une temporalité, avec un autre rythme, à un temps liquide. Les nouvelles de J.-G. Ballard(2) évoquent ces espaces où les choses se confrontent et où les langages se croisent.

C’est le cas dans l’œuvre réversible Isotopie, un drap de bain imprimé recto-verso en trompe-l’œil photographique. Nous avons retrouvé dans le bras de I‘Huveaune des éléments de carreaux de faïence, des fragments d’espaces intimes déversés dans la rivière comme dans toute les villes, que nous avons rassemblés dans un nid de poule du bitume de la Place Castellane.
Cette action fait écho au concept d’hétérotopie, l’Isotopie devenant ici la possibilité de concentrer une expérience fragmentée de marche dans l’Huveaune et dans le même temps d’être en présence d’un espace composite de et dans la ville. L’espace de l’œuvre place Castellane peut ainsi être comparé à une sorte de warp zone (que connaissent ceux qui pratiquent les jeux vidéo). Il y a derrière ce geste, une projection de l’urbanité comme forme de jeu, une recherche et une pratique d’espaces de liberté restant dans la ville. »

(1) gillesclement.com
(2) écrivain de science-fiction et d’anticipation sociale anglais (1930-2009)

Pour en savoir plus : lesfreresripoulain.eu
straatgalerie.com