OLIVIER MOSSET « UNTITLED » – MAMO MARSEILLE

Célébrant en 2018 ses 5 ans, le MAMO accueille jusqu’au 30 septembre l’exposition « Untitled » d’Olivier Mosset. C’est sur le toit de la Cité Radieuse élaborée par Le Corbusier, entre 1945 et 1952, que se déploient les deux installations de l’artiste suisse, qui inaugure sa réflexion sur la peinture dès les années 1960, au sein du groupe BMPT avec Daniel Buren, Michel Parmentier et Niele Toroni.

Surplombant Marseille, le sommet du bâtiment invite le regard du spectateur à se perdre dans l’intensité et la magnificence du paysage qui, de fait, oriente sinon modèle la réception des œuvres. L’environnement et l’architecture du lieu deviennent des éléments majeurs de l’expérience de l’exposition, avec lesquels l’artiste amorce un dialogue. La visite s’ouvre néanmoins à l’intérieur du MAMO, dans ce qui fut naguère le gymnase de l’utopie urbaine imaginée par l’architecte qu’Ora-ïto a réaménagé en centre d’art, avec une Harley Davidson 74’ Panhead datant de 1957 ayant appartenu à l’artiste. Pas vraiment objet banal, il s’agit d’un objet du quotidien d’Olivier Mosset, qui revêt un caractère symbolique et qui, dans la scénographie de la pièce, se voit doter d’une place centrale qui se suffit à elle-même : la moto est en effet le seul élément exposé dans l’espace intérieur. Emblème de l’intérêt d’Olivier Mosset pour le monde des Bikers qui va jusqu’à accueillir des réunions de motards dans son atelier rue de Lappe il y a des décennies, l’objet fonctionne comme un ready-made aidé qui vient ouvrir le jeu de couleurs et de perspectives monumentales qui s’opère sur la terrasse. En effet, la peinture des carrosseries est modifiée et laisse découvrir l’effet caméléon qui organise les deux installations picturales extérieures.

Les deux œuvres se répondent : l’une est verticale et mesure 5 mètres, l’autre est horizontale et s’étend sur 18 mètres. Elles consistent en l’assemblage de multiples plaques métalliques peintes de manière à ce que les surfaces subissent nombre de variations au grès de la lumière, du mouvement du spectateur et du temps. Du vert au violet, du violet au vert, c’est la puissance du moiré immergé dans le paysage qui interpelle. Olivier Mosset déclarait en 2002 :

« L’œuvre d’art est quelque chose que l’on regarde. Cela la rend supportable et quelque fois même, par le biais de mécanismes complexes, intéressante. »

C’est littéralement ce parti-pris radical qu’applique l’artiste en dévoilant les limites du monochrome dont il a exploré les enjeux dès le début de sa carrière. En effet, par le regard, l’œuvre prend forme et aboutit réellement, face à l’œil. La pratique picturale amorcée par Malevitch ou Rodtchenko se voit être mise à nu, face à ses impossibilités à conserver sa nature mono. L’entreprise d’Olivier Mosset signale les multiples couleurs qui apparaissent au moment de la réception de l’œuvre grâce à différents effets d’optique et qui, de fait, font partie de l’œuvre. Dès lors, l’exposition « Untitled » consiste pour l’artiste en une métacritique, puisqu’il s’agit de poursuivre la critique de la peinture qu’était le monochrome vers le monochrome lui-même et, inaugure un chantier pictural sur les surfaces miroitantes.

Texte Anysia Troin-Guis © 2018 Point contemporain

Visuel de présentation : Olivier Mosset – MAMO – Crédit photo © Aurélien Meimaris