BENOÎT BLANCHARD

BENOÎT BLANCHARD

Benoît Blanchard, Ciel, 2021. Huile sur toile, 170x170cm Photo Benoît Blanchard

PORTRAIT D’ARTISTE / Benoît Blanchard
par Malory Puche

Les quatre saisons

Jeudi dernier, alors que j’étais de passage à Reims pour quelques jours, Benoît Blanchard m’a accueilli dans son atelier pour me présenter son travail. 

Lorsque j’entre dans la pièce qui lui sert d’atelier, mes sens sont instantanément avivés. Mon regard est d’abord attiré par un vieux marche pied en bois recouvert de peinture de différentes couleurs sur lequel sont disposés des outils, des chiffons, des pots en verre et des palettes. Mon attention se porte ensuite sur les nombreux tableaux retournés contre les murs, soigneusement rangés, classés par tailles ; avant de me rendre compte que derrière moi se trouve l’unique toile dont le sujet est visible, Ciel (2021). Je me retrouve absorbée par un grand ciel diurne, un ciel bleu de printemps d’avril. Cette immensité m’attire et j’ai soudainement envie de plonger dedans et de flotter parmi les nuages peints. De la douceur et de la légèreté se dégagent de ce tableau qui devient une sorte de fenêtre ouverte sur le ciel marnais. 

Une délicieuse odeur de cannelle et de pommes cuites me sort de mon vagabondage dans ce ciel et me ramène dans cette pièce. Une tarte aux pommes vient de sortir du four. 

Avant de s’installer à Reims, Benoît Blanchard vivait à Paris où il réalisait de petites toiles. Lorsqu’il est arrivé dans la Marne, c’est cet immense ciel et cet horizon lointain qui l’ont d’abord frappé. « Ici, le ciel est plus grand » me dit-il. Depuis, il réalise de grandes huiles sur toile dans lesquelles il représente des ciels et des magmas atmosphériques qui varient en fonction des saisons. 

Benoît Blanchard, Été#1, 2020. Huile sur toile, 162x114cm.
Benoît Blanchard, Été#1, 2020. Huile sur toile, 162x114cm. Photo Benoît Blanchard
Benoît Blanchard, Été#2, 2020. Huile sur toile, 162x114cm
Benoît Blanchard, Été#2, 2020. Huile sur toile, 162x114cm Photo Benoît Blanchard

Été#1 (2020) et Été#2 (2020) sont les deux premières toiles qu’il me présente. Les tons rose-orangés, bleutés et dorés qui les composent me font voyager en plein été. Une aura solaire émane de ces tableaux et les couleurs employées me renvoient à l’atmosphère chaleureuse des paysages estivaux.

Avec ses tons rosés et bleutés, Specola#14 (2018) me transporte dans les lueurs de l’aube d’un matin d’octobre. Quant à Sirocco (2019), elle m’invite à voyager dans des paysages automnaux composés de nuances d’oranges, de marrons, de cuivres et de brun-roux. Cette toile me rappelle les tapis de feuilles-mortes qui jonchent les forêts mais aussi l’odeur particulièrement réconfortante du bois qui se consume dans les cheminées, l’hiver approchant.

Les ciels hivernaux de l’artiste sont plus froids et plus gris. Les nuages sont chargés d’amas de gouttes d’eau, quelque chose de très vaporeux se dégage de ces toiles et la présence de peinture blanche me fait songer à des paysages enneigés. 

Benoît Blanchard, Specola#8, août 2018. Huile sur toile, 46x55cm
Benoît Blanchard, Specola#8, août 2018. Huile sur toile, 46x55cm Photo Benoît Blanchard
Benoît Blanchard, Specola#14, octobre 2018. Huile sur toile, 55x46cm
Benoît Blanchard, Specola#14, octobre 2018. Huile sur toile, 55x46cm Photo Benoît Blanchard

Les surfaces vitrées ou miroitantes ont elles aussi leur importance dans le travail de l’artiste, elles participent à propager l’atmosphère et la lumière de ces différents ciels de Marne et elles nous ouvrent sur leur immensité. Devant Specola#8(2018), j’ai l’impression d’être face à un miroir dans lequel mon reflet aurait complètement disparu derrière la buée. Verre(2020), quant à elle, me rappelle une fenêtre qui donnerait sur un ciel nuageux. Mon regard est attiré par une mouche discrète, peinte en haut à gauche de la toile. Tel un signe de ponctuation, elle marque une pause dans le temps et fixe l’instant.

Les tableaux de Benoît Blanchard nécessitent un travail sur la durée. Certains d’entre eux sont même retouchés plusieurs années après leur création. D’une première œuvre en naît alors une seconde. Chacune des toiles est composée d’une multitude de couches de peinture très liquide, au point que celle-ci pénètre la toile par les interstices qui la composent. Un motif abstrait apparaît, fait de petites touches de couleurs qui parsèment l’envers de ses tableaux à l’image des taches de rousseur ou des grains de beauté sur la peau. 

En plus de ces différentes atmosphères, certaines œuvres m’évoquent diverses matières minérales comme des pierres précieuses ou du marbre. Benoît Blanchard accorde en effet une place importante aux minéraux et s’attache à peindre des sortes de fragments de sculptures comme dans Fragment (Mère et fille) (2020), une des dernières toiles que l’artiste me présente.

Mon voyage à travers les quatre saisons prend fin. Mon esprit vagabonde encore dans ces magmas atmosphériques et quand je sors de l’atelier de Benoît Blanchard, je ne peux m’empêcher de lever les yeux et de contempler ce grand ciel marnais.

par Malory Puche

Benoît Blanchard, Sirocco, 2019. Huile sur toile, 46x55cm. Photo Benoît Blanchard
Benoît Blanchard, Sirocco, 2019. Huile sur toile, 46x55cm. Photo Benoît Blanchard
Benoît Blanchard, Fragment (Mère et fille), 2020. Huile sur toile, 100x70cm. Photo Benoît Blanchard
Benoît Blanchard, Fragment (Mère et fille), 2020. Huile sur toile, 100x70cm. Photo Benoît Blanchard
Benoît Blanchard, Verre, 2020. Huile sur toile, 100x50cm. Photo Benoît Blanchard
Benoît Blanchard, Verre, 2020. Huile sur toile, 100x50cm. Photo Benoît Blanchard