HORIZONS CONVERGENTS

EN DIRECT / « Horizons Convergents » exposition organisée à l’occasion de la FIAC 2021 en collaboration avec la Galerie Waddington Custot réunit Etel Adnan, Sheila Hicks et Sophia Vari
jusqu’au 07 novembre 2021, Clavé Fine Art, Paris

Commissaires d’exposition Laurence Custot et Isaure Bouriez.

S’il est précisé dans le communiqué de presse qu’il s’agit d’une exposition intimiste c’est que tout converge en ce sens. Parmi les artistes présentées, on connait bien le travail de Sheila Hicks dont les œuvres monumentales furent l’objet d’une exposition en 2018 au Centre Georges Pompidou. Mais ici, un autre plaisir s’offre à nous, une proximité que la galerie Clavé Fine Art permet de mettre en œuvre. L’ancien atelier de l’artiste César, écrin de la jeune galerie, se situe dans un quartier où nombre d’artistes ont eu et ont encore leur lieu de travail. Un quartier historique de la « fabrique » de l’art dans Paris et non de sa seule vente ou exposition. Il est donc bien agréable de sillonner dans les petites rues charmantes et vivantes de ce quartier habité pour franchir, après une ballade rue Daguerre, la porte de ce lieu encore chargé de présence d’art. La démarche entreprise ici sort les œuvres du contexte traditionnel de la galerie. Intimité, proximité, chaleur sont des mots qui viennent en bouche en pénétrant dans le lieu. Les collaborations avec d’autres galeristes – actuellement la galerie londonienne Waddington Custot – sont symptomatiques de la démarche engagée par Antoine Clavé, petit fils du sculpteur Antoni Clavé, en ouvrant le lieu : des rencontres, des liens, des tissages, des horizons communs qui se nouent et dialoguent. 

Avec l’exposition Horizons convergents trois artistes sont les phares qui nous éclairent : Etel Adnan, Sheila Hicks et Sophia Vari. Toutes trois vivent à Paris après avoir parcouru le monde, rencontré et développé des pratiques qui se nourrissent de savoirs-faire, d’artisanat, de métier. La confrontation aux matériaux est particulièrement sensible au cœur de l’exposition, des matériaux que chacune à sa façon modèle, transforme. Les petits tissages raffinés de Sheila Hicks dialoguent avec les marbres de carrare de Sophia Vari avec qui les peintures d’Etel Adnan partagent une grande sensibilité, une sensualité aussi. Car de leurs voyages, de tous leurs horizons si différents, de toutes ces cultures aux beautés nomades, elles sont revenues avec quelque chose d’essentiel, comme purifié, épuré, quelque chose qui va jusqu’à la limite de la forme, du matériau, qui en magnifie sa présence par les gestes qu’elles accomplissent pour faire forme. Quelque chose chaque fois s’incarne, des évocations d’architecture, des corps, des paysages, tout un monde, tout le Monde qui converge en ce lieu. Les courbes voluptueuses des sculptures de Sophia Vari scintillent dans la lumière délicate de la galerie, elles invitent à la caresse comme à suivre les lignes qui viennent mourir en douceur de masse en surface. Les fils emmaillotés, tissés, noués, emmêlés de Sheila Hicks transportent du Maroc à l’Inde et à l’Amérique du Sud, et touchent aux limites de l’art du tissage, parfois en laissant des zones fragiles d’absence répondre à des densités opaques comme peut l’être parfois la vie, un fils tendu. Aspirations de lumière, presque respirations de couleurs, évocation de lointains acidulés, ainsi semblent vibrer les petits tableaux d’Etel Adnan. Mais entre ces trois phares, telles d’élégants voiliers sillonnant les mers bleus, s’invitent dans ce voyage d’autres œuvres, des parenthèses enchantées d’artistes à redécouvrir avec bonheur. Laissons ici la surprise faire son effet.

Laurence Gossart