Catherine PONCIN – De l’image par l’image

Catherine PONCIN – De l’image par l’image

Catherine Poncin, Sans titre n°003004, série Du Nous, 1997
Courtesy artiste et Galerie Les Filles du Calvaire Paris

EN DIRECT / Expositions de Catherine Poncin, Carpe Diem. Regard sur les collections et autres traversées au Musée d’Art, Histoire et Archéologie du 15 juin au 17 novembre 2019 et Eloge de l’ordinaire. De l’image par l’image à la Maison des Arts Solange-Baudoux du 15 juin au 27 août 2019
par Anne-Marie Morice

Evreux donne une carte blanche à l’artiste Catherine Poncin en présentant, dans une double exposition, un bel ensemble de ses dispositifs photographiques de 1997 à maintenant. On peut y apprécier la logique de la démarche de Catherine Poncin qui consiste à sortir de l’oubli des photographies d’anonymes et à s’en servir comme matière première pour construire de nouveaux récits. Ses images sont issues de découpes dans le temps historique de la prise de vues. Poncin procède par recadrages, collages et poliptyques pour « revenir à la vie en partant de l’inerte » comme le dit Michel Poivert dans le livre qui accompagne l’événement. 

A la Maison des Arts sont présentés par Christine Ollier des tirages extraits de neuf séries, issues le plus souvent de commandes émanant de services d’archives municipaux, départementaux, muséaux et d’institutions. C’est un bouquet d’humanité qui nous enveloppe, issu de mondes disparus, femmes, enfants, hommes le plus souvent au travail, disciplinés, intenses, bouleversés, dignes. Poncin aime le temps long de la résidence qui lui permet d’entrer dans un corpus documentaire. Elle se laisse guider, par son regard et son imagination pour libérer les signes visuels, les propulser dans de nouvelles fictions. Ici elle a mis la ville sens dessus dessous, scénographié le travail à l’usine, s’est enfoncée dans les profondeurs de la fosse minière. 

Au musée d’art et d’histoire invitée par Florence Calame-Levert à « prendre en main la collection et son histoire avec son regard d’artiste » elle présente un nouveau travail centré sur le volume et le mouvement. Les objets qu’elle a choisi sont issus en partie du fond archéologique du sanctuaire gaullois découvert à Evreux au XIXe siècle. Elle a aussi considéré l’ensemble de la collection du musée et tiré partie du matériel de conservation des oeuvres. Sur un fond noir profond les statuettes en terre cuite, Vénus ou bustes, surgissent en clair obscur comme exhumées du temps. Sur un fond blanc bombé, un non tissé qui les enveloppe et protège, les pièces précieuses se découvrent en pleine lumière, semblant s’éveiller après leur long sommeil dans les réserves, alors qu’un « facing », feuille transparente cristal laisse deviner le portrait de femme de Michel Hubert Descours (XVIIIe siècle). Une Brillante vanité, un crane trépanné présenté face à un miroir non réfléchissant et rehaussé de diamants se transforme en memento mori dans une séquence dont le seul événement consiste en l’effeuillement progressif d’une rose blanche. La rose et son pouvoir de regénérescence est peut être l’une des clés du titre donné à cette exposition. Fondatrice d’un imaginaire collectif, elle crée un fil transversal dans le parcours, symbole de l’hymen, de la plénitude et aussi de la fatuité. Un hommage lui est rendu par une vidéo immersive dont la bande sonore est une composition originale de Philippe Valembois. 

Une autre clé peut être un certain passage à l’abstraction qui résonne avec la collection contemporaine du musée. Car avec Carpe Diem, Poncin aborde de nouveaux procédés de mise en rythme de ses images : le collage, l’inclusion, le bougé. Si la trace, le signe sont toujours aussi présents dans sa démarche, l’invention, la poésie prennent le spectateur par surprise. En procédant autrement que par le film, Poncin affirme sa manière à elle de mettre l’image en mouvement. 

Anne-Marie Morice

Catherine Poncin, Carmen mundi, 2014
Catherine Poncin, Carmen mundi, 2014
Courtesy artiste et Galerie Les Filles du Calvaire Paris
Catherine Poncin, Le banquet, Epona et autres réminiscences, 2018-2019 (détail)
Catherine Poncin, Le banquet, Epona et autres réminiscences, 2018-2019 (détail)
Courtesy artiste et Musée d’Evreux / Galerie Les Filles du Calvaire Paris
Catherine Poncin, sans titre n°001, Diptyque, série Entre-Actes, 1997
Catherine Poncin, sans titre n°001, Diptyque, série Entre-Actes, 1997
Courtesy artiste et Galerie Les Filles du Calvaire Paris
Catherine Poncin, Traversées 2015, Pétra et Sysiphe d'après le Titien
Catherine Poncin, Traversées 2015, Pétra et Sysiphe d’après le Titien
Courtesy artiste et Galerie Les Filles du Calvaire Paris

INFOS PRATIQUES

Carpe Diem. Regard sur les collections et autres traversées,
Musée d’Art, Histoire et Archéologie,
6 rue Charles Corbeau, 27000 Evreux.
Du 15 juin au 17 novembre 2019

Eloge de l’ordinaire. De l’image par l’image,
Maison des Arts Solange-Baudoux,
2 rue de la Légion d’Honneur, 27000 Evreux.
Du 15 juin au 24 août 2019

Carpe Diem Catherine Poncin, livre-catalogue édité par Filigranes. 

www.evreux.fr