GUILLAUME LINARD OSORIO, À THOMAS EDISSON, LES PAPILLONS RECONNAISSANTS

GUILLAUME LINARD OSORIO, À THOMAS EDISSON, LES PAPILLONS RECONNAISSANTS

vue exposition Guillaume Linard Osorio, A Thomas Edison, les papillons reconnaissants, Le Mur espace de création, Moret-Loing-et-Orvanne – Photo Tony Querrec

EN DIRECT / Exposition Guillaume Linard Osorio, A Thomas Edison, les papillons reconnaissants jusqu’au 22 octobre 2023, Le Mur espace de création, Moret-Loing-et-Orvanne

L’exposition ‘À Thomas Edison, les papillons reconnaissants’ de Guillaume Linard Osorio prend racine sur une équation (à une) inconnue, questionnant notre rapport au monde digital et au monde réel. Au fil du parcours, l’équation reste imprimée en nous. Elle opère comme un glitch cervical et nous donne les clés d’appréhension des œuvres et de leur sujet.

X x Bulb = Moon x Screen.

Guillaume Linard Osorio tente ici de transcrire sous forme mathématique un parallèle évolutionnel qu’il a observé entre les êtres humains et les papillons.

Les papillons sont attirés par la lumière de nos ampoules (Bulb) ; désorientés, ils s’en approchent, pensant, à tort, que cette lumière artificielle est celle de la Lune (Moon).

Depuis peu, l’être humain semble développer le même trouble de comportement. Attiré par la lumière des écrans (Screen) qu’il a créé, il glisse peu à peu vers un monde artificiel, quitte, peut-être, à se brûler les ailes. Alors, si les papillons cherchent la Lune, que cherchons-nous (X) ?

Pour Le Mur, Guillaume Linard Osorio met en place une série d’objets érigés symboliquement comme des écrans, soudains matérialisés dans le monde réel. Composés de deux feuilles de polycarbonate peintes, d’une ossature métallique et augmentés d’objets réels divers, les volumes nous intriguent car leur statut est trouble, oscillant sans cesse entre le ready-made, l’élément scénographique et l’objet de création pure.

L’ossature métallique des œuvres rappelle la grille dessinée au sol et semble exister comme simple indication de l’espace dans lequel nous nous trouvons : un espace en mutation, en cours de réflexion, où l’image aplatie prend une forme tridimensionnelle étrangement dénuée de substance, comme évidée. Dans cet espace d’entre-deux, nous pouvons alors voir à travers et au-delà de l’écran et ainsi prendre la mesure du metaverse que l’artiste interroge.

Cet univers filaire et multidimensionnel invite à la déambulation, entre, autour et à travers les œuvres. Sur les arêtes des structures parallélépipédiques en acier noir qui rythment l’espace, des feuilles de polycarbonate alvéolaire sont fixées. Injectées d’encres aux couleurs douces et traversées de lumière, on en devine la profondeur. Un pas de côté suffit pour que la surface industrielle se dédouble. Le sens des alvéoles, inversé d’une feuille à l’autre, crée un effet pixelisant, translucide mais jamais entièrement transparent. En dépassant les volumes et en traversant les écrans successifs, on découvre l’envers de ce qui s’apparente finalement à un décor. Là gisent de simples objets, familiers et étranges à la fois. En effet on leur a retiré quelque chose de vital : à la plante, sa sève et au célèbre fauteuil Butterfly, sa toile.

Ces objets fabriqués par l’être humain dans l’objectif d’être produits et démultipliés sont ici figés entre deux mondes, ni tout à fait physiques, ni tout à fait virtuels, à la fois objets et représentations de l’objet.

Le dispositif d’œuvres mis en place par Guillaume Linard Osorio confère à l’exposition une impression d’étrange familiarité. Notre instinct nous pousse alors à vouloir rationaliser ce monde dans lequel nous nous trouvons soudain propulsés. Le glitch cervical revient. On remarque des photographies de plantes disparues négligemment posées sur les écrans. Leur format ne leur correspond pas, l’image flotte sans cadrage et l’écran est laissé presque entièrement à ses pixels.

Les écrans peints sont des œuvres de création pure et font écho aux précédents travaux de l’artiste. Ils en suggèrent l’idée mais échappent à ses représentations traditionnelles. Leur format légèrement trapu (200 x 160 cm) ne correspond pas à celui allongé dont nous avons l’habitude car il a été déterminé par la taille et les limites du corps de l’artiste. Au-delà de l’artifice, le geste artistique ramène l’œuvre à son humanité.

Dans X x Bulb = Moon x Screen, tout est question de lumière diffractée. Il y a les sources lumineuses (l’ampoule-Bulb, la Lune-Moon), qui, associées aux écrans pixellisés (Screen), permettent la diffusion de fractions d’objets.

X, représenté symboliquement par un néon dans l’exposition, est mystérieux mais représente à sa manière le substitut, l’imitation, et donc l’infinie possibilité.

Bulb, Moon, Screen, X.

Deux sources lumineuses initiales et deux agents de la multitude. Peut-être la question à cette équation n’est-elle pas ‘qu’est X ?’ mais ‘qui est X ?’. Face au mur de selfies générés par intelligence artificielle, nous faisons enfin face à ce que le monde digital sait (faire) de nous.

En trouvant à l’issue de l’exposition une réponse singulière à l’équation posée, X s’incarne. Il est le sujet réel de cette exposition dont le metaverse n’est qu’un prétexte pour sensibiliser à la disparition des êtres animés et inanimés de notre monde réel.

Justine Daquin

vue exposition Guillaume Linard Osorio, A Thomas Edison, les papillons reconnaissants, Le Mur espace de création, Moret-Loing-et-Orvanne
vue exposition Guillaume Linard Osorio, A Thomas Edison, les papillons reconnaissants, Le Mur espace de création, Moret-Loing-et-Orvanne – Photo Tony Querrec
vue exposition Guillaume Linard Osorio, A Thomas Edison, les papillons reconnaissants, Le Mur espace de création, Moret-Loing-et-Orvanne
vue exposition Guillaume Linard Osorio, A Thomas Edison, les papillons reconnaissants, Le Mur espace de création, Moret-Loing-et-Orvanne – Photo Tony Querrec
vue exposition Guillaume Linard Osorio, A Thomas Edison, les papillons reconnaissants, Le Mur espace de création, Moret-Loing-et-Orvanne
vue exposition Guillaume Linard Osorio, A Thomas Edison, les papillons reconnaissants, Le Mur espace de création, Moret-Loing-et-Orvanne
vue exposition Guillaume Linard Osorio, A Thomas Edison, les papillons reconnaissants, Le Mur espace de création, Moret-Loing-et-Orvanne
vue exposition Guillaume Linard Osorio, A Thomas Edison, les papillons reconnaissants, Le Mur espace de création, Moret-Loing-et-Orvanne