MINIMALISME – MEXIQUE

MINIMALISME – MEXIQUE

EN DIRECT / Exposition Minimalisme – Mexique avec Aldo Chaparro, Ruben Ortiz Torres, Francisco Ugarte, Carlos Garcia Noriega Bueno, Diana Garcia
du 04 mars au 26 avril 2020, 193 Gallery Paris
commissariat Samantha Barroero et César Lévy

Animé par le désir d’explorer des scènes d’art contemporain des quatre coins du monde, César Lévy fondateur et directeur de la 193 Gallery nous invite au fil des expositions à des changements radicaux de médiums et d’esthétiques, passant de l’art tribal de Papouasie Nouvelle Guinée, au light art et à l’art digital au Chili, de la peinture abstraite thaïlandaise à l’art minimal mexicain. Il nous convie à travers ces voyages qui nous amènent d’un continent à l’autre à aborder l’art contemporain par une vision personnelle, aiguisée, à aller « plus loin » que les définitions encyclopédiques et des quelques noms autour desquels se construisent les courants artistiques. Une exploration toujours inspirée qu’il effectue accompagné de spécialistes sur la thématique abordée avec cette envie « d’être challengé par des gens qui viennent du pays ou qui ont une vraie sensibilité sur la thématique. » (César Lévy )

Une manière d’envisager l’art contemporain hors de ces tendances qui fixent le marché et qui façonnent des collections à la tonalité trop vite désuète, car c’est bien au travers des démarches propectives, exigeantes, que se dessinent les grandes collections. César Levy a cette envie fondamentale de toujours surprendre le collectionneur, jusqu’à ce qu’il s’étonne lui-même de s’intéresser à des formes d’art auxquelles il n’avait jusqu’alors prêté aucune attention. Il pose la question du « goût » dans l’art, autre que ce « bon goût » communément admis. Un « goût » porteur d’une curiosité véritable et qui amène le désir dans des registres que l’on ne soupçonnait pas.

La galerie devient, dans cet esprit de découverte, un espace où se croisent des thématiques comme des esthétiques venues de toutes les périodes, de tous médiums et pays. Un laboratoire expérimental qui ne peut que déplacer les curseurs établis et forcément réducteurs de l’art contemporain. Son histoire a montré que celui-ci est multiple, mobile et évolutif mais non dans la temporalité des modes édictées par les institutions et les événements officiels, mais bien dans toutes les potentialités créatrices du monde au travers de ces fabriques du futur que sont les studios d’artistes. César Lévy nous propose de partager cette dynamique sans contrainte, avec ce risque inhérent de bousculer les codes établis.

Il répond à cette nature profonde de l’art contemporain qui est de dépasser les frontières. Le surréalisme s’est épanoui autant en France qu’en Belgique qu’au Chili, le cubiste, l’expressionnisme ont eux aussi été transfrontaliers, et ont permis que s’épanouissent des esthétiques nouvelles en lien avec l’histoire des peuples. César Lévy nous donne accès à cette rencontre entre une forme d’art et une culture. Il veut nous montrer que cet enrichissement permanent fait qu’il échappe aux tentatives de définition, que l’art s’est nourri et enrichi des cultures étrangères, populaires qui ont été pour lui autant de chambres de résonance. Tout comme les artistes ont cette envie de ne pas réduire leur activité à un seul pays ou capitale, mais de vivre dans une dynamique internationale, d’ateliers à Paris, Londres jusqu’à Athènes et d’exposer à New York ou ailleurs, la galerie répond parfaitement à cette demande croissante des collectionneurs qui ne veulent pas se focaliser sur des scènes locales mais suivre l’évolution de la carrière internationale des artistes qu’ils ont envie de défendre. Car c’est bien une aventure partagée qu’ils ont le désir de vivre. 

Chaque exposition à la 193 Gallery est construite à travers une sélection d’artistes dont la visite des ateliers crée une relation de proximité. La galerie peut ainsi revendiquer cette vision internationale de l’art tout en conservant une échelle où peut être ressentie une émotion, la passion des échanges avec des artistes vivants. 

L’exposition  Minimalisme  a été co-construite avec la commissaire et critique d’art Samantha Barroero dont le parcours l’a amenée à fréquenter  la Villa Arson à Nice au temps où elle était dirigée par Christian Bernard accueillant pendant les années 90 de grands artistes radicaux et conceptuels, à se former à la Galerie Evelyne Canus à la Colle-sur-Loup qui représentait l’art abstrait, minimal et concret avec notamment Joe Baer, Noël Dolla, Fabian Marcaccio, Olivier Mosset, Steven Parrino, Günter Umberg, Adrian Schiess ou Gottfried Honegger…, artistes soutenus également par Gilbert Brownstone avec qui elle collabore depuis vingt ans, à Paris. A travers l’exposition Minimalisme , Samantha Barroero et César Lévy nous entraînent dans la vision mexicaine de l’art minimal en exposant les œuvres d’artistes souvent reconnus internationalement et de leurs héritiers contemporains n’ayant encore que peu de visibilité en Europe sinon dans les institutions.

L’exposition aborde l’art minimal mexicain autour de cinq artistes et de deux médiums que sont la sculpture et la peinture avec cet impératif de faire partager une « expérience » aux visiteurs. Celle-ci passe par un aménagement spécifique de la galerie, vidée pour l’occasion de ses meubles. Rien ne doit perturber le regard, altérer les sens dans l’appréhension de l’oeuvre. Plus que tout autre, l’art minimal est « un réservoir à émotions ». Une notion de relation à l’œuvre qui passe par une scénographie très précise, un travail sur la lumière et la mise en espace. Des œuvres qui imposent, nous dit Samantha Barroero, « toujours une friction ou une tension ». Faites de métaux lourds, elles sont étonnament légères, donnant même une impression de fragilité, elles attirent comme elles peuvent nous placer à distance avec leurs arêtes saillantes. Elle peuvent être appréhendées dans leur totalité et pourtant elles échappent au regard par la fragmentation des surfaces. Passages, reflets, ondulations, réfraction ou absorption de la lumière, l’œuvre minimale est « une prouesse technique qui n’est pas montrée pour ce qu’elle est mais pour atteindre d’autres champs de réflexions ». Chacune des sculptures et des peintures présentées traduisent « une recherche esthétique par excellence, la forme, la couleur, la ligne » (Samantha Barroero). Elles ont une dimension contemplative et traduise une forme de « spiritualité ».

Les œuvres, sans infléchir leur propre sens pour l’assimiler à l’actualité, interrogent sur la manière dont les artistes nous font part de cette histoire mexicaine, de ce contexte géopolitique marqué par la scission entre les Amériques car « L’art est forcément un vecteur de tout ce qui est à l’œuvre dans une société. » (Samantha Barroero) Dans leurs échanges avec les artistes, les deux commissaires ont en tête cette situation du Mexique. Une situation que le public connaît aussi et qu’il pourra aussi d’une certaine manière interpréter à travers les œuvres. Des questions de migrations, des situations de pauvreté et de violence qui nous affectent tous. 

Prenant le contre-pied de l’attendu, où l’art est marqué par la figuration, du muralisme aux artisanats populaires, l’exposition comme les précédentes nous donne à voir des « scènes lointaines que l’on n’imagine pas très contemporaines » et qui pourtant sont très dynamiques, bouillonnantes même portées par des artistes marqués par un contexte politique difficile qui produisent des œuvres fortes.

Daniel Guionnet, fondateur de Point contemporain
et critique d’art membre de l’AICA

Carlos Garcia Noriega Bueno, Alma Dura IV
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Aldo Chaparro, Mx Silver, Februrary 6, 2020, 14:23
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Diana Garcia, Be what you dream
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Rubén Ortiz Torres, Blackest America
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Francisco Ugarte, Reflection
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