JANET BIGGS ET YAPCI RAMOS : CONNECTIONS À MONTEVIDEO

La connectivité est un culte de notre temps : entre les personnes, dans les relations internationales, sur les médias sociaux, entre l’homme et l’environnement naturel. Mais la connectivité fait également face à de nombreux défis, allant des tendances mondiales à l’exclusion à l’écart croissant entre les classes sociales et les pays, la fermeture des frontières et la persistance de l’individualisme.
L’art contemporain, par nature contextuel et soucieux du présent, aborde de manière récurrente la connectivité mondiale. C’est en effet la voie choisie par Janet Biggs et Yapci Ramos: les deux artistes explorent volontiers des univers a priori incompatibles, mais utilisant des approches distinctement différentes: analytique et méditative pour Biggs, organique et incarné pour Ramos.

Les vidéos de Biggs sont à la fois documentaires, analytiques et esthétiques. Les images de l’artiste rassemblent des situations qui au premier abord ne semblent pas liées, ce qui indique que notre réalité complexe ne peut être réduite à une seule essence. Les œuvres de Ramos, au contraire, proviennent d’une extrême sensibilité qui amène l’artiste à se connecter autant avec son propre corps et le monde naturel qu’avec celle d’amis et d’étrangers, ainsi que leurs confessions ouvertes sur l’existence et l’intimité.

Pourquoi réunir ces deux artistes, ces deux femmes? Leur art, basé sur l’investigation et le témoignage, porte essentiellement sur les liens et les connexions. Ils partagent un sens aigu de notre relation au monde; ils abordent l’humanité avec un angle plus large que celui du genre, indiquant qu’en tant qu’êtres humains, notre vie, notre corps, nos actions et nos contradictions ne peuvent être relégués uniquement à l’identité de genre; ils sont eux-mêmes des sujets interconnectés dans un monde en constante évolution. Leur connectivité, au-delà des concepts, devient pour eux un moyen de transcender leurs vies.
Les œuvres de Biggs et de Ramos peuvent être considérées comme une «connexion multiple», évoquant de multiples aspects de la réalité contemporaine, dont le sujet, la nature, le désir, le sublime, la soumission, la vulgarité, le partage… jamais isolés les uns des autres.

Connections promeut le principe actif et démonstratif de la communication : chaque œuvre, en plus de son propre thème, réfléchit et stimule les autres. Chaque œuvre spécifique fonctionne pour elle-même, enrichit et prolonge l’offre artistique au-delà de la cellule de l’ancienne prison occupée par l’EAC´s (Montevideo, Uruguay). Le terme clé ici est la fluidité. De plus, les deux commissaires, Barbara Polla et Paul Ardenne, travaillent en synergie pour magnifier cette fluidité, à la fois dans l’espace d’exposition et en s’ouvrant au monde.