JULIE COULON, KISSING IN A CABRIOLET

JULIE COULON, KISSING IN A CABRIOLET

Julie Coulon, Kissing in a Cabriolet, 2020, Installation Vidéo, 10min, deux écrans. Avec Martin Depalle et Pauline de Fontgalland.

FOCUS / Julie Coulon, Kissing in a Cabriolet, installation Vidéo
par Jeanne Burin des Roziers

Dans un élan amoureux, deux figures s’offrent à nous, cachés sous les ombres dorées et changeantes d’un tunnel infini. Blottis dans un reflet de rétroviseur, leurs visages ne font plus qu’un et la dualité se transforme alors, sous nos yeux, en entité fusionnée. Présenté comme un jeu de miroir où les plans s’alternent et se répondent par un face à face, le baiser nous apparaît comme le motif même du double.

Julie Coulon, dans sa pièce Kissing in a Cabriolet, explore cet espace mince et dense duquel naît la tension : le flottement lourd de la confrontation avant qu’elle n’éclate. L’alternance incessante de l’ombre et de la lumière nous évoque ainsi une urgence, un danger, la fuite sur une route sans fin. Le temps s’étire ad nauseam et nous immobilise le temps d’un baiser qui s’éternise. Ce temps fictif de la subjectivité se joue de nos représentations collectives et questionne ce que serait “le baiser de cinéma”. Une blonde hitchcockienne noyée dans les bras d’un jeune premier aux cheveux plaqués, un cabriolet rouge fendant la route dans la nuit, un clair obscur de plateau de tournage – dont on aperçoit le contrechamps dans le reflet du pare-brise.

Témoignant d’une approche de la fiction par le réel, Julie Coulon, pour cette installation vidéo, travaille avec Martin Depalle et Pauline de Fontgalland, couple d’artistes dont le baiser ainsi immortalisé questionne la frontière entre image et fiction. Nous ne sommes pas devant une simple mise en scène, l’artiste fait le choix de deux modèles amoureux dont le rôle serait alors leur propre personne, troublant les contours d’un simple jeu d’imitations, et de direction d’acteur. L’œuvre se révèle ainsi comme une immersion moite et douce auprès d’un couple dont on partagerait un instant volé.

L’observateur se transforme ainsi en voyeur impudique, portant son regard, malgré lui, sur une réelle intimité. La sensualité devient gênante, la langueur devient malaise, et la vidéo continue de tourner, jusqu’à temps que la mélancolie reprenne le dessus. Il y a là, à la lisière de ce « baiser de cinéma » et de la confrontation à notre propre regard invasif, quelque chose de l’ordre du rêve inavouable.

Kissing in a Cabriolet propose ainsi une rencontre qui se mue en affrontement et nous laisse en suspens, comme la fin d’un baiser.

Jeanne Burin des Roziers

Julie Coulon, Kissing in a Cabriolet, 2020, Installation Vidéo, 10min, deux écrans. Avec Martin Depalle et Pauline de Fontgalland.
Julie Coulon, Kissing in a Cabriolet, 2020, Installation Vidéo, 10min, deux écrans. Avec Martin Depalle et Pauline de Fontgalland.


JULIE COULON
 – BIOGRAPHIE

Julie Coulon (b.1997) vit et travaille à Paris. Son travail photographique et filmique se développe aux Beaux-Arts de Paris, ainsi qu’à la School of Visual Arts de New York. Témoignant d’une approche de la fiction par le réel, elle met en scène ses amis proches en écho aux images du cinéma et de l’histoire de l’art qui lui tiennent à coeur.
Son travail a été sélectionné pour plusieurs expositions collectives, au Théâtre de la Criée à Marseille et lors du Festival Photo – Saint Germain à Paris. Julie Coulon a récemment reçu la bourse honorifique de l’institut franco-allemand pour la jeunesse lors de sa résidence de post diplôme à la Hochschule für bildende Künste de Hambourg.

« Je commence chacune de mes images avec un sentiment de colère. Faire une image, c’est faire des choix, prendre position. Et les miennes, je les construit à la lisière du réel et de la fiction. Au bord d’un drame que le spectateur peut décider de feindre sous l’esthétique volontairement composée. Mes images sont des combats mis en scènes sur des plateaux de cinéma, dont l’unique propos est d’évoquer un bouleversement. »

https://juliecoulon.com