Cabinets de curiosités : l’esprit de collectionneurs et de lieux de collections

Cabinets de curiosités : l’esprit de collectionneurs et de lieux de collections

Collection d’Antoine de Galbert,
Vue de l’exposition « Cabinets de curiosités », Photo N. Savale © FHEL, 2019

EN DIRECT / Exposition CABINETS DE CURIOSITÉS du 23 juin 2019 au 03 novembre 2019, Fonds Hélène & Édouard Leclerc pour la Culture aux Capucins, Landerneau
par Pauline Lisowski

Les cabinets de curiosités fleurissent dans différentes expositions. Des œuvres d’art contemporain se découvrent désormais dans des musées scientifiques et côtoient des collections en tout genre. Les lieux patrimoniaux accueillent également des œuvres d’artistes qui s’inspirent de leur architecture et de leur histoire. On redécouvre un goût pour l’objet, ce qui est étrange, surprenant, précieux par le regard qu’on y porte.

Ainsi, l’exposition proposée au Fonds Hélène et Edouard Leclerc tient de cet engouement pour cette résurgence de ce modèle muséal. Elle offre l’occasion de découvrir une multitude de lieux et de collections de personnalités. « Cabinets de curiosités » est le fruit de la rencontre entre Laurent Le Bon et Patrick Mauriès, lui-même collectionneur. Tous deux se sont unis pour proposer une histoire et une géographie du cabinet de curiosités.

Vue de l'exposition "Cabinets de curiosités", Photo N. Savale © FHEL, 2019
Vue de l’exposition « Cabinets de curiosités », Photo N. Savale © FHEL, 2019

L’exposition s’ouvre avec une introduction historique pour ensuite dévoiler la multitude des propositions, réinterprétations et échos de ce phénomène. La scénographe Jasmin Oezcebi a conçu un parcours volontairement non chronologique présentant une décomposition des salles, chacune consacrée à une collection. Ici, le mobilier Cabinet est déplacé pour devenir matrice d’un système de modules de l’espace. Un papier peint rappelle l’histoire des cabinets de curiosités. Chaque section consacrée à une collection comporte un dispositif spécifique d’indication et d’accrochage. Notre regard est attiré par différents objets, œuvres d’art et éléments provenant de divers horizons. Les origines et indications ne sont pas données de prime abord pour conserver le mystère. Les musées et les collections privées viennent ainsi directement à nous. Ce fut un défi pour certains lieux de réunir dans un espace à échelle réduite un ensemble d’éléments et de les exposer autrement. Ici, l’accrochage est revisité selon chaque collection.

Corallium rubrum (Linnaeus, 1758), Spécimen collecté dans la mer Méditerranée et conservé à sec, Paris, Muséum national d'Histoire naturelle, Photo N. Savale
Corallium rubrum (Linnaeus, 1758), Spécimen collecté dans la mer Méditerranée et conservé à sec, Paris, Muséum national d’Histoire naturelle, Photo N. Savale

Pour le Museum d’Histoire Naturelle de Paris, cette exposition fut l’occasion d’imaginer un autre type de classement, par couleur. On peut s’émerveiller devant des insectes, des coquillages, un échantillon de l’herbier qui y est conservé. Cette présentation reflète une recherche sur l’origine de l’arrivée de ces objets, rares, qui continuent d’intriguer et d’attirer des recherches. L’artiste Théo Mercier, qui récemment a bénéficié d’une exposition au Musée de la Chasse et de la Nature à Paris, a eu carte blanche pour proposer une œuvre spécifique. On entre dans son univers décalé, humoristique, interrogeant nos relations aux objets et aux animaux. La collection d’Antoine de Galbert reflète son intérêt pour l’animal au travers des œuvres présentées.

Le cabinet de Patrick Mauriès est reconstitué et nous perçons alors l’intimité de ce collectionneur. La scénographe a choisi de témoigner de l’esprit de cette personnalité qui se révèle à travers son appartement et ses objets.

Le Musée de la Chasse et de la Nature à Paris, bien connu pour l’intégration des œuvres d’art au milieu d’une collection des plus singulière fait l’objet d’une recomposition. Là encore, ce choix nous invite à redécouvrir une sélection de pièces dans un contexte neutre. La salle Emile Hermès nécessite elle un regard des plus aiguisé de la part du visiteur, incité à passer à travers des espaces étroits.

Collection du Musée de la Chasse et de la Nature (Paris), Vue de l'exposition "Cabinets de curiosités", Photo N. Savale © FHEL, 2019
Collection du Musée de la Chasse et de la Nature (Paris)
Vue de l’exposition « Cabinets de curiosités », Photo N. Savale © FHEL, 2019

Nous circulons parmi tous ses objets et œuvres conservés et chaque section nous fait basculer vers un univers, un espace-temps dans lequel nous sommes incités à nous interroger sur ces lieux et sur leurs modalités de fonctionnement.

L’artiste Miquel Barceló présente sa collection qu’il mêle à des objets fabriqués. Une vitrine avec des cartes postales et autres éléments issus de son quotidien dévoile son cheminement artistique. Il s’apparente également à un scientifique en s’appliquant à collecter et à conserver des végétaux marins.

La salle Jean-Jacques Lebel réunit un ensemble d’œuvres issues de différentes périodes et territoires. Notre attention et intérêt s’active au fur et à mesure que nous entrons dans un monde.

Collection de Jean-Jacques Lebel, Vue de l'exposition "Cabinets de curiosités", Photo N. Savale © FHEL, 2019
Collection de Jean-Jacques Lebel
Vue de l’exposition « Cabinets de curiosités », Photo N. Savale © FHEL, 2019

À ces collections artistiques, d’autres plus étranges sont à découvrir comme la collection de marteaux du commissaire-priseur de François Curiel, celle de boîtes de sardines d’Edouard Leclerc ainsi que celle de sabliers de Jacques Attali : comble des collections qu’on peut imaginer ici exposées. Ces objets du quotidien font écho aux collections de tout un chacun. Nous retrouvons le plaisir de collectionner, de réunir, de présenter et des souvenirs de collections du quotidien peuvent surgir.

En fonction des collections, les légendes et les cartels prennent une autre dimension. Peu de détails pour privilégier la quête et le plaisir d’imaginer. Le mystère des éléments, objets et autres formes artistiques est alors préservé.

Ainsi, chaque espace permet de faire l’expérience d’un certain type de regard, de parcours visuel. Cette exposition dévoile une diversité de propositions d’accrochage et d’attention. Elle nous invite à profiter d’atmosphères très différentes et de solliciter notre éveil du regard. La densité d’éléments exposés nous conduit à nous souvenir de ces univers et nécessite pour les plus courageux de prendre le temps de revenir.

Collection de la Faculté de médecine de l'Université de Montpellier, Conservatoire d'anatomie, Vue de l'exposition "Cabinets de curiosités", Photo N. Savale © FHEL, 2019
Collection de la Faculté de médecine de l’Université de Montpellier,
Conservatoire d’anatomie,
Vue de l’exposition « Cabinets de curiosités », Photo N. Savale © FHEL, 2019

Texte de Pauline Lisowski pour Curiosités contemporaines, 2019

Cabinets de curiosités, Exposition du 23 juin au 03 novembre 2019
Fonds pour la culture Hélène & Édouard Leclerc