Côme Clérino, Materiae Picturae Formatio

Côme Clérino, Materiae Picturae Formatio

Le 14 juin 2018
Entre Bâle et Marseille
Depuis Art Basel vers le FRAC PACA
09h21 a.m.

“Dans le tissue de l’espace comme dans la nature de la matière,
figure, en tout petit, la signature de l’artiste”
Carl Sagan, Contact

Nombreuses ont été les époques et les courants de peinture qui ont fait de la lumière, la caractéristique première des recherches picturales d’alors. De la renaissance jusqu’au Caravage, nous avons connu le développement en peinture du Clair-Obscur. A l’apogée du romantisme anglais, on qualifiât de « peintre de la lumière », William Turner, communément considéré comme le précurseur de l’impressionnisme. L’impressionnisme lui-même, théorisait la lumière et son écriture sur la toile. Nous en arrivons même, encore aujourd’hui, à des déclarations très autoritaires comme peut les avoir Gilles Genty : «La seule matière de la peinture, c’est la lumière.».
C’est donc sans compter sur ces peintres qui, par opposition, comme en réponse à toutes ces recherches, ont créé en Europe, au début du 20ème siècle, la peinture dite « matiériste », dans ce mouvement soutenu par Michel Tapié, nombreux ont été les peintres qui ont pu se retrouver dans cette pratique.
Nous pourrions donc aisément poser ici le postulat de l’importance de la lumière sur la matière et/ou inversement.

Qu’en est-il alors lorsque l’utilisation de la matière permet à juste titre la « mise en lumière » d’un paysage quotidien que nous traversons tous mais que nous ne regardons plus ? Nous le savons, cela ayant déjà été écrit à plusieurs reprises, Côme Clérino, trouve les motifs et les matières dont il s’inspire, dans la rue. Sur les chemins qui le mènent de chez lui à son atelier, dans des errances plus déambulatoires, ou encore dans des trajets de collecte de « motifs / matières » qu’il compile soigneusement dans ses carnets.
Source inépuisables, sans cesse renouvelée : la rue certes. Surtout un espace urbain à transmutation rapide où les murs se détériorent, les affiches se déchirent, les chantiers se démultiplient et se métamorphosent à mesure qu’ils avancent et laissent derrière eux, les traces de la construction et les débris, qui érigent de nouveaux murs. Nouveau décorum de nos déplacements quotidiens et des déplacements quotidiens de l’artiste.

C’est toutes ces matières et tous ces changements, que l’on retrouve dans les œuvres de Côme Clérino. Mousses, résines, plastiques et enduits, autant de matériaux aux propriétés antinomiques : friables, cassants, solidifiant ou malléables. Autant de combinaisons avec lesquelles il compose et agence, comme avec autant de couleurs sur sa palette. Sauf qu’à défaut de la simple couleur révélatrice ou réflectrice de lumière, est appliqué ici une combinaison d’effets-matériaux-couleur, directement empruntés dans la gamme de notre quotidien urbain.
Très souvent dans ses carnets (nuancier sans fin à l’opposé du Pantone sagement numéroté) dont il se sert pour reproduire en estampe, en peinture ou en installation picturale, les compositions de matière qui, prennent avec le temps de plus en plus de liberté et sortent du format de la feuille ou du châssis. Quitte à s’inspirer d’éléments picturaux récoltés sur les murs de la ville, Côme, présente très souvent son travail en grands panneaux-fresques, plus ou moins grands pans, détachés des murs de l’espace d’exposition.

Quoi de plus légitime lorsque l’on s’inspire des murs qui nous accompagnent quotidiennement que de leur rendre justice en faisant de cette matière picturale urbaine, non plus seulement une gamme d’inspiration mais, la structure même de cette picturalité.

Nous nous retrouvons donc en face de ces œuvres, en vis-à-vis avec une composition établie à partir de motifs/matière structurant.e.s, d’inspiration urbaines, où la picturalité couvrante de nos édifices urbains se fait aussi matériaux porteurs et structurant.
Quelle est l’aspérité qui recouvre, la surface lisse qui homogénéise, la brèche dans la matière qui nous montre qu’un élément est solvable dans l’autre ou bien au contraire… Autant de petits combats de matières picturales amoureuses, qui nourrissent immanquable notre regard, de moins en moins attentifs sur la beauté de ce qui recouvre les surfaces de nos villes et les changements qui s’y opèrent.

In fine, d’une façon encore plus interdépendante, tant qu’à explorer la matière qui fait la surface de nos villes, Côme Clérino, dans ces dernières recherches, s’applique à transposer tout cette picturalité, sur des matériaux recouvrant (Carrelages de Fayence, émaux de terre cuite, linoleums imperméables de fonds de piscines, vitrophanie, ou vitres de verres teintés etc.), qui seront à leurs tours les composant d’un édifice construit, embelli et scénographié par un architecte ou un décorateur d’intérieur…
Mise en abîme exponentielle, et pied de nez de maître.
Lorsque que les défauts, les ratés, les ébréchés et les laissés pour compte des murs que l’on ne regarde plus, se font le décorum d’une inspiration créatrice nous faisant les voire a nouveaux dans ce qu’ils ont de plus beau et que ces compositions finissent elles-mêmes par embellir à leur tour de nouveaux édifices en construction, on approche la maestria.

Texte Léo Marin, Membre de l’Association internationale des critiques d’art (A.I.C.A.) © 2018 

 

Visuel de présentation : Côme Clérino, VERSO, 2017. Vue exposition « La Régle du Jeu », Grandes Serres. Résine, parafine, fibre de verre, contreplaqué, acrylique, sérigraphie, feutre, bâton à l’huile, pigment, colle à carrelage et impression laser, 300 x 300 cm, 2017.

 


Côme Clérino
Vit et travaille à Paris.

DNSAP (Félicitations du Jury/ Honors from the Jury), Ecole Nationale Superieure des Beaux-Arts, Paris (2011-2016)

www.comeclerino.com

 

Côme Clerino, REVERS BLEU UN Transfer, acétone, acrylique, pastel, bâton à l’huile, crayon de couleur, feutre et mine graphite sur papier, 140 x 100 cm, 2017.
Côme Clérino, Revers Bleu un
Transfer, acétone, acrylique, pastel, bâton à l’huile, crayon de couleur, feutre et mine graphite sur papier, 140 x 100 cm, 2017.

 

Côme Clerino, VERSO DEUX, 2017. Vue exposition Voir au verso Transfer, acétone, pastel, crayon de couleur, feutre, blanco, sérigraphie, acrylique et mine graphite sur papier 140 x 100 cm, 2017.
Côme Clérino, Verso Deux, 2017. Vue exposition Voir au verso
Transfer, acétone, pastel, crayon de couleur, feutre, blanco, sérigraphie, acrylique et mine graphite sur papier 140 x 100 cm, 2017.

 

Côme Clerino, Revers Bleu un • Revers Bleu deux • Revers Bleu trois • Revers Bleu quatre • Revers Bleu cinq  Techniques mixtes sur papier, 100 x 140 cm, 2017.
Côme Clérino, Revers Bleu un • Revers Bleu deux • Revers Bleu trois • Revers Bleu quatre • Revers Bleu cinq
Techniques mixtes sur papier, 100 x 140 cm, 2017

 

Côme Clerino, Salvage 3, 2017. Vue exposition « L’entre-Deux », Galerie Épisodique  190x125cm / 2018. Mousse, résine acrylique, fibre de verre, paraffine, gomme laque liquide, latex, plexiglas, tissu, plastique, colle vinylique, cuir, fil de couture, mousse expansible et bois.
Côme Clérino, Salvage 3, 2017. Vue exposition « L’entre-Deux », Galerie Épisodique
190 x 125 cm / 2018. Mousse, résine acrylique, fibre de verre, paraffine, gomme laque liquide, latex, plexiglas, tissu, plastique, colle vinylique, cuir, fil de couture, mousse expansible et bois.

 

Côme Clerino, SALVAGE 2, 2018. Mousse, résine acrylique, résine polyester, fibre de verre, parafine, gomme laque liquide, acrylique, colle vinylique, cuir, latex et bois 160 x 120 cm 2018-06-30
Côme Clérino, Salvage 2, 2018. Mousse, résine acrylique, résine polyester, fibre de verre, parafine, gomme laque liquide, acrylique, colle vinylique, cuir, latex et bois 160 x 120 cm. 2018-06-30

 

Côme Clerino, VERSO TROIS, 2018. Vue exposition Voir au verso Transfer, acétone, stylo à bille, encre de stylo à bille crayon de couleur, sérigraphie, feutre, pastel, bâton à l’huile, acrylique, collage et mine graphite sur papier, 140 x100 cm, 2017
Côme Clérino, Verso trois, 2018. Vue exposition Voir au verso
Transfer, acétone, stylo à bille, encre de stylo à bille crayon de couleur, sérigraphie, feutre, pastel, bâton à l’huile, acrylique, collage et mine graphite sur papier, 140 x100 cm, 2017

 

Côme Clérino, 3 Rue du Débarcadère  Vue exposition [arch] Second Œuvre Techniques mixtes sur toile montée sur bois, 310 x 420 cm, 2016.
Côme Clérino, 3 Rue du Débarcadère
Vue exposition [arch] Second Œuvre
Techniques mixtes sur toile montée sur bois, 310 x 420 cm, 2016.
Côme Clérino, UNTITLED, 2018. Vue exposition Voir au verso Techniques mixtes sur papier, 20 x 30 cm, 2017
Côme Clérino, Untitled, 2018. Vue exposition Voir au verso
Techniques mixtes sur papier, 20 x 30 cm, 2017

 

Côme Clérino, Salvage 2 • Salvage 1, 2018. Vue exposition Emplacement (2) Mousse, résine acrylique, résine polyester,  fibre de provisoire verre, parafine, gomme laque liquide, acrylique, colle vinylique, cuir, latex et bois 160 x 120 cm (1) Mousse, résine acrylique, résine polyester, paraf ne, impression laser, javel, teinture textile, tissu, colle vinylique, moquette, acrylique, latex et bois 160 x 120 cm 2018
Côme Clérino, Salvage 2 • Salvage 1, 2018. Vue exposition Emplacement
(2) Mousse, résine acrylique, résine polyester, fibre de provisoire verre, parafine, gomme laque liquide, acrylique, colle vinylique, cuir, latex et bois 160 x 120 cm
(1) Mousse, résine acrylique, résine polyester, paraf ne, impression laser, javel, teinture textile, tissu, colle vinylique, moquette, acrylique, latex et bois 160 x 120 cm, 2018

 

Côme Clérino, REVERS BLEU DEUX  Transfer, acétone, acrylique, pastel, bâton à l’huile, crayon de couleur, feutre et mine graphite sur papier, 140 x 100 cm, 2017.
Côme Clérino, Revers Bleu deux
Transfer, acétone, acrylique, pastel, bâton à l’huile, crayon de couleur, feutre et mine graphite sur papier, 140 x 100 cm, 2017.

 

Côme Clerino, REVERS BLEU TROIS  Transfer, acétone, acrylique, pastel, bâton à l’huile, crayon de couleur, feutre et mine graphite sur papier, 140 x 100 cm, 2017
Côme Clérino, Revers Bleu trois
Transfer, acétone, acrylique, pastel, bâton à l’huile, crayon de couleur, feutre et mine graphite sur papier, 140 x 100 cm, 2017