[EN DIRECT] La littorale #6 : des œuvres dans un milieu en perpétuel changement – Biennale d’Anglet

[EN DIRECT] La littorale #6 : des œuvres dans un milieu en perpétuel changement – Biennale d’Anglet

Pour sa sixième édition, la biennale d’Anglet fut coordonnée par Paul Ardenne. L’écrivain, historien de l’art et commissaire d’exposition a considéré le littoral comme un paysage en tension permanente. Il a porté sa réflexion sur le rivage, ce milieu à l’identité complexe. Douze artistes internationaux furent invités à prendre la mesure du site et à saisir ses enjeux. Cet environnement a aussi conduit Paul Ardenne à intégrer des projets au contenu écologique. Pour répondre à ce contexte, les œuvres, pour la plupart réalisées pour le lieu, n’ont pas pour vocation d’y rester : Certaines sont éphémères et ont évolué avec le temps depuis l’ouverture de la biennale tandis que d’autres repartiront selon la volonté des artistes. Chaque œuvre répond à la complexité du rivage comme espace balnéaire de loisirs, espace frontière et de contact ainsi qu’espace fragile et en rapide évolution. Leur présence amène l’habitant et le touriste à modifier son regard sur ce paysage, à s’interroger sur son histoire, son actualité et son devenir.

Sur un lieu de promenade, en appui sur la grotte de la Chambre d’Amour, l’Accroche-Cœurs du collectif art nOmad invite les passants à venir déposer des vœux écrits et autres ex-voto à la gloire de l’amour, de la félicité et de la création joyeuse. Cette sculpture renvoie à une tradition locale et ranime pour le temps de l’événement un moment de partage. Dans le parc écologique Izadia, près de l’étang, une cabane intrigue le promeneur. Inaccessible, cette construction de Conrad Bakker fait référence à la mythique cabine d’Henry David Thoreau, construite dans les années 1850 à Walden Pond près de Concord dans le Massachusetts.

Sur ce même site, la barque en terre crue de Rachel Labastie, enfouie dans la vase, semble être prise par la force du rivage.
Benedetto Bufalino s’est lui intéressé à la plage comme lieu de loisirs et paysage fragile. Il a composé une sorte de terrain de sport, fermé de longs murs blancs. Le long de la promenade Victor Mendiboure, le palmier monumental de Laurent Perbos fait écho à l’imagerie kitsch de la plage, une envie d’ailleurs. Ces artistes nous font voir ce que cache le cadre balnéaire qui attire tant.

Plus loin, sur une autre plage, on peut découvrir d’étranges personnages en sable réalisés par Andrea Mastrovito. Chaque jour, ils sont recouverts et détruits par les mouvements propres au rivage. Ces sculptures, qui évoluent en continu avec le paysage et ses changements, renvoient aux situations des migrants. Le duo Lucy et Jorge Orta a réfléchi au littoral comme espace à risques et y propose Unité d’Intervention Mobile, un véhicule de secours pour toute personne en situation de survie. Un sous-marin, sculpture monumentale de Kemal Tufan intrigue le promeneur. Comme échoué, recouvert de vêtements cédés par les habitants de la ville, cette œuvre évoque également les événements et les tensions qui marquent le rivage.
La sculpture de Fabrice Anglade se repère de loin. Par ses formes organiques, elle incite à imaginer un possible phénomène naturel, une construction dans le paysage.
Cette biennale d’art contemporain, au delà de révéler le paysage où elle s’inscrit, amène le promeneur, visiteur à s’interroger sur les enjeux écologiques. Si certaines œuvres sont ludiques, font écho aux loisirs, une des caractéristiques de ce littoral, d’autres, par leurs matériaux, évoquent l’instabilité de ce paysage et les situations difficiles qui s’y déroulent. Durant cette biennale, ces projets auront marqué le site et construit un nouveau récit. Une fois cette exposition terminée, ils resteront ancrés dans la mémoire des habitants d’Anglet.

Pauline Lisowski