JEONGMOON CHOI : LE POULS DE LA TERRE

JEONGMOON CHOI : LE POULS DE LA TERRE

The Pulse of the Earth, ©Frac Alsace, 2020, ©Jeongmoon Choi. Photo : Pierre Rich.

EN DIRECT / Exposition JEONGMOON CHOI : LE POULS DE LA TERRE 
Du 29 février au 16 août 2020, FRAC Alsace, Sélestat

Commissaire d’exposition Felizitas Diering, Directrice du FRAC Alsace

« Je dessine les mouvements et les vibrations de la terre. Quelles traces et mémoires matérielles et immatérielles les tremblements de terre laissent-ils derrière eux ? L’exposition se concentre sur le processus de visualisation avec mon langage artistique. » 
Jeongmoon Choi

Pour sa première exposition institutionnelle en France, l’artiste coréenne Jeongmoon Choi (née en 1966 à Séoul, vit et travaille à Berlin), explore les thèmes de la ligne et de l’espace, du mouvement et du temps, du corps et de l’environnement.

L’artiste réalise une nouvelle installation in situ, The Pulse of the Earth, qui évoque le pouls de la terre lors d’un séisme et transforme l’espace vitré du FRAC Alsace en un dessin immersif, tel un sismogramme en trois dimensions, à la fois esthétique et inquiétant. La façade du bâtiment permet à l’œuvre de changer au fil des heures jusqu’à prendre toute sa dimension à la nuit tombée. 

The Pulse of the Earth, ©Frac Alsace, 2020, ©Jeongmoon Choi. Photo : Pierre Rich.
The Pulse of the Earth, ©Frac Alsace, 2020, ©Jeongmoon Choi. Photo : Pierre Rich.
The Pulse of the Earth, ©Frac Alsace, 2020, ©Jeongmoon Choi. Photo : Pierre Rich.
The Pulse of the Earth, ©Frac Alsace, 2020, ©Jeongmoon Choi. Photo : Pierre Rich.
The Pulse of the Earth, ©Frac Alsace, 2020, ©Jeongmoon Choi. Photo : Pierre Rich.
The Pulse of the Earth, ©Frac Alsace, 2020, ©Jeongmoon Choi. Photo : Pierre Rich.

Dans cette œuvre, Jeongmoon Choi traite des notions de l’espace visuel et sonore, du corps, du temps et de l’environnement qui sont explorées et mises en valeur dans une grande installation réalisée en fils réfléchissant la lumière noire. Tendus entre le plafond et les murs, ces fils forment un grand maillage en transparence à travers lequel le visiteur est amené à vivre une expérience sensorielle. Immersive et labyrinthique, cette œuvre visuelle et auditive entraîne le visiteur à s’approprier un nouvel « espace intermédiaire » partagé entre ombre et lumière et qui se plie au passage des corps et dessine de nouvelles perspectives et trajectoires à apprivoiser. 

L’installation est aussi un dispositif d’enregistrement qui utilise les fils comme conducteurs du son selon un procédé technique de pliage et de torsion permettant aux filaments à la fois de conduire les vibrations et les sons environnants. En entrant dans l’espace, on entend un pouls humain, celui de l’artiste, qui s’accélère et se ralentit selon le son du sismogramme de la fréquence pré-enregistrée du tremblement de terre de Tohoku, l’un des plus grands tsunamis qui conduisit à la catastrophe nucléaire de Fukushima en 2011. « Je vise un moment où l’impulsion visuelle et acoustique de l’installation se confond avec l’impulsion du visiteur ». Le pouls du visiteur peut fusionner avec celui de l’artiste, le processus mettant alors en exergue celui de la Terre et ses perturbations.  

Provoquant des impressions paradoxales, les œuvres sensuelles et abstraites de Jeongmoon Choi jouent avec les limites de notre perception pour tendre vers le transcendant et l’intangible. L’artiste nous rappelle à l’ordre sur les dysfonctionnements d’une activité humaine qui se confronte en permanence aux énergies cosmiques de la Nature. Une manière de réfléchir sur la vulnérabilité de notre espèce et la fragilité de notre environnement tout comme sur la beauté de la création qui parfois laisse place à un sentiment de menace et d’instabilité face aux effets des catastrophes et phénomènes naturels. 

Une exposition à méditer et tout particulièrement en cette période actuelle…

©Frac Alsace, 2020, ©Jeongmoon Choi. Photo : Pierre Rich.
©Frac Alsace, 2020, ©Jeongmoon Choi. Photo : Pierre Rich.

Dans le cadre de cette exposition, l’artiste Jeongmoon Choi a tenu à activer son œuvre. En collaboration avec l’Ecole de Théâtre Physique de Strasbourg, un film a été tourné et une performance jouée lors du vernissage de l’exposition le vendredi 28 février dernier. 

©Frac Alsace, 2020, ©Jeongmoon Choi. Photo : Pierre Rich.
©Frac Alsace, 2020, ©Jeongmoon Choi. Photo : Pierre Rich.
L’École de Théâtre Physique de Strasbourg : https://theatre-physique.com/

Dans le film et l’activation physique de l’installation, la chorégraphie suit la sonification du tremblement de terre : accentuant phases dramatiques et accalmies, les danseurs évoluent entre les lignes et les perspectives que les fils dessinent dans l’espace tandis que le son leur permet d’exprimer les vibrations rythmiques de la Terre. Guidés par l’artiste tout en se laissant aller à l’improvisation, les mouvements seront exécutés entre lignes de lumière UV et espaces vides, entre danger et vulnérabilité. 

À travers cette collaboration de théâtre physique, Jeongmoon Choi reprend les gestes et le travail physique et corporel qui jouent un rôle important dans le processus de création. Elle rappelle les enjeux de son œuvre située entre les positions et perceptions analogiques et numériques, et lance dans un même temps un processus de recherche sur les structures, les mouvements, les perspectives dans l’espace et le jeu des corps.

Deux autres œuvres en 2D complètent l’exposition et reprennent le dessin, pratique originelle de l’artiste. 

Tohoku, 9.0Mw, Japan, 11 Mar. 2011, fils, cadres, en trois parties, 2019. ©Frac Alsace, 2020, ©Jeongmoon Choi. Photo : Pierre Rich.
Tohoku, 9.0Mw, Japan, 11 Mar. 2011, fils, cadres, en trois parties, 2019. ©Frac Alsace, 2020, ©Jeongmoon Choi. Photo : Pierre Rich.

L’artiste enregistre sous forme de code-barres le jour tragique du 11 mars 2011, lorsque le tremblement de terre d’une magnitude de 9,0Mw (échelle de Richter) a dévasté la région de Tohoku au Japon. À l’aide d’un générateur en ligne, le titre Tohoku, 9.0Mw, Japan, 11 Mar. 2011 est transformé en symboles binaires composés de différentes largeurs de lignes et espaces parallèles. Ce code-barres est à nouveau dessiné à la main avec des fils noirs et blancs tendus de chaque côté du cadre. L’espace qui en résulte vibre comme un écho des chocs de la terre et oscille fait et l’illusion. Dans son ensemble, l’image n’est pas perceptible à l’œil humain. La catastrophe naturelle visualisée sous forme de code- barres contredit l’objectif réel d’un code-barres, qui simplifie et rend notre vie quotidienne contrôlable par un «beep». Les travaux portent à la fois sur la relation paradoxale entre la technologie moderne et les phénomènes naturels incontrôlables ainsi que sur la disparition de l’information. La date et le lieu de la catastrophe de Tohoku ont été oubliés aujourd’hui, mais les conséquences de la catastrophe sont toujours présentes.

Tectonic Score, dessins sur papier encadrés, 2019. ©Frac Alsace, 2020, ©Jeongmoon Choi. Photo : Pierre Rich.
Tectonic Score, dessins sur papier encadrés, 2019. ©Frac Alsace, 2020, ©Jeongmoon Choi. Photo : Pierre Rich.

Tectonic Score explore la tectonique des plaques de la terre et le rythme de ses mouvements avec des lignes simples, ici traitées telles des partitions sismiques qui font lien avec l’installation The Pulse of the Earth

« Puis-je transmettre le son inaudible de la terre à travers mon dessin dans l’espace ? Je m’intéresse depuis longtemps à la relation entre la ligne et l’espace intermédiaire – pas seulement dans un espace tridimensionnel, mais aussi sur papier ou sur toile. Dans cet entre-deux apparaissent comme des sources d’énergie, des formes concrètes que l’on peut retrouver entre l’espace ‘vide’ de la feuille et le spectateur. »

Comme des portées de musique, les lignes placées ici en diagonale traduisent le pouvoir incontrôlable de la Nature. L’artiste cherche à transmettre le son inaudible de la Terre à travers ce dessin tout en s’intéressant particulièrement à l’espace entre deux lignes. 

Textes Eléonore Gros, Chargée des projets artistiques
et Felizitas Diering 

FRAC Alsace
1 route de Marckolsheim
67600 SÉLESTAT

Les horaires d’ouverture de l’exposition varient en fonction de la lumière naturelle.

www.frac.culture-alsace.org