LUBOMIR TYPLT, CONTRE LES LOIS DE LA GRAVITÉ
Vue exposition Lubomir Typlt Contre les lois de la gravité (Proti Zákonom Gravitácie) Mantra Concept à Bratislava – Courtesy de l’artiste
EN DIRECT / Exposition Lubomir Typlt Contre les lois de la gravité (Proti Zákonom Gravitácie) jusqu’au 14 février 2023, chez Mantra Concept à Bratislava (Pradiareň 1900 Svätoplukova 2/A)
LUBOMIR TYPLT : ENTRE LÉVITATION ET GRAVITATION
Texte : Anna Remuzon
Il y a déjà quelques années, en 2016, Lubomir Typlt présentait ses œuvres au Centre culturel tchèque de Paris. Formé à l’Académie des Beaux-Arts de Prague mais aussi celle de Düsseldorf… et auprès de personnalités comme A.R. Penck ou Markus Lüpertz, il fait aujourd’hui partie des incontournables de la scène contemporaine d’Europe centrale… à mi-chemin entre l’expressionnisme figuratif tchèque et allemand… un style à part et sans frontière !
L’été dernier, il présentait son exposition “Lévitation” à la fameuse Villa Pellé de Prague, dans une ambiance intimiste et domestique où le spectateur se sentait comme chez lui dans une succession de pièces et d’étages ; chaque espace étant comme un chapitre différent d’une longue histoire que le spectateur découvrait pas à pas… ou en lévitation.
Lubomir Typlt s’expose aujourd’hui chez Mantra Concept à Bratislava, dans un espace totalement différent… très ouvert et industriel… pour venir défier les lois de la gravité. Les toiles évoluent dans un nouveau contexte, une nouvelle dimension propice à une autre forme d’ascension… tandis que le manège des vélos, aux parapluies oranges en guise de roues, tourne et flotte dans les airs comme un mobile et une mécanique universelle… à la fois enfantine et surréaliste. Elle interroge l’équilibre du réel.
Ces deux expositions n’en formeraient-elles finalement qu’une, tant elles invitent à revivre, à reconsidérer, à ressentir la continuité dans le changement… et le changement dans la continuité ? Il y a dans cette nouvelle exposition, l’affirmation d’une volonté antérieure… un nouvel élan. Qu’il s’agisse de lévitation ou de gravitation… le corps comme la toile s’élèvent… au-dessus du monde. Pourtant, si la lévitation a une dimension magique et surnaturelle… une forme de rituel à la manière des sorcières de Goya… la gravitation appartient au domaine de la science et de l’expérience. Il invite à s’élever par l’art, en se situant à la confluence de ces deux mondes, et en prenant part à de nouveaux horizons possibles… hors sol.
Dans toutes les œuvres de l’artiste, on retrouve des couleurs vives et une lumière naturelle et surnaturelle. Du bleu au rouge, les couleurs froides et chaudes s’équilibrent dans un fracas étonnant. Le contraste (bleu, rose, jaune…) sur le corps et les visages agit comme si les personnages étaient éclairés par un feu mystique ou cosmique… intensifiant leurs humeurs et leurs expressions. Il y a une forme de jeunesse immortelle et en suspension.
Garçons et filles ne se rencontrent pas sur la toile, comme dans une cour d’école… des amis différents, des « jeux » différents… pas de sentiments ambigus entre eux ou le spectateur. Parfois les garçons se regroupent en une communauté prophétique… parfois la fille exécute une danse plus proche des rites de sorcière. L’individualité n’a ni place ni importance réelle dans ces compositions car le groupe et l’expression prédominent. C’est une petite société. Ils s’habillent de la même manière, de plusieurs couleurs. Les rires, les sourires, les mains, les postures, les regards et les interactions entre les personnages suggèrent les intentions et les potentielles affinités ou tensions. Cependant, les scènes sont dominées par le silence et les tonalités subtiles des couleurs… L’interprétation reste ambiguë et largement ouverte pour le spectateur pour qui tout devient possible comme dans une cour d’école… Le spectateur participe en tant que membre du groupe… à la récréation inattendue… une cérémonie pour défier les lois de la gravité… un jeu d’enfant !
Les visages cachés, les cheveux au vent… l’arrêt et le mouvement… contrastent avec les grands yeux globes que les filles tiennent comme une balle légère et aérienne… souvent pointés comme un laser. La cécité et la vue sont en conflit… Des visions multiples. En cela, les filles et leurs corps sont souvent accompagnés d’une silhouette plus grande… comme une mère ou une puissante déesse. Sa robe se confond avec le décor comme une montagne… un rocher. Elle enseigne, domine et contrôle la situation ! Les filles (filles) n’ont aucune autonomie dans cet ordre hiérarchique… clouées au sol.
Quant à l’iconique et incontournable bébé qui pleure, dans plusieurs variations de couleurs… le spectateur peut entendre le bruit rien qu’à l’expression du visage. La répétition, l’accumulation de toiles, semblables mais toujours différentes comme une décomposition du mouvement… comme un rythme musical… résonne dans la pièce… omniprésente. A mesure que les visages se multiplient… le cri continue… devient plus fort. Ce n’est pas un poupon… c’est un géant… un univers inconsolable et puissant !
Plus d’informations :
https://www.typlt.com
https://www.instagram.com/lubomir_typlt/
https://www.mantraconcept.com/