Jonathan Bréchignac, SVALBARD PETRI

Jonathan Bréchignac, SVALBARD PETRI

FOCUS / Jonathan Bréchignac, SVALBARD PETRI, Dimensions variables, 2018 (Boîtes de Pétri, fragments (végétaux, minéraux et animaux), résine, leds)

par Sophie Bernal

Il est impossible de prédire le futur avec exactitude. Il est pourtant possible de spéculer les formes qui y émergeront. Attiré par la biologie, la science-fiction et la géologie, Jonathan Bréchignac interroge les zones de friction entre chacune de ces disciplines. Il créé une œuvre plurielle, mêlée de sculptures, d’installations et de peinture, qui étudie l’impact de l’Être humain sur les écosystèmes terrestres et marins. Dans sa série du sculptures Alien Rocks (2018), il recréé des pierres à partir de matériaux composites. Nées d’une effusion de formes organiques et de couleurs synthétiques, ces pierres cristallisent la mutation de l’objet naturel en artefact. Elles renvoient au plastiglomérat, une roche née de la pollution plastique contenue dans les océans. Observé pour la première fois en 2006, ce phénomène témoigne des modifications anthropiques des écosystèmes marins et terrestres. L’action de l’eau de mer qui vient frapper la roche dépose des microplastiques sur sa surface, et créé alors une « plasticroûte ». Alien Rocks n’est pas seulement un appel à une prise de conscience. C’est aussi une ode au bizarroïde. Une exploration mentale de paysages rocailleux extraterrestres. Il y est question de sonder les origines de la vie à travers l’étude de strates géologiques. Or, les découvertes des sources de notre monde sont tributaires d’un fantasme partagé : celui d’une vérité détenue au loin. Humboldt est allé explorer les Andes, Darwin les Galápagos, avec cette finalité utopique de chercher ailleurs les sources de la vie. L’ailleurs est pourtant relatif dans l’œuvre de Jonathan : s’il renvoie dans cette série à une forme d’exobiologie, il prend il prend les traits d’un monde subaquatique dans l’installation Svalbard Petri (2018). L’œuvre se compose d’une dizaine de disques translucides dans lesquels sont emprisonnés des fragments de coquillage, de coraux, de plumes et de sédiments rocheux. Réseau artificiel de méduses, l’installation se fait monstre marin lorsqu’elle épouse les surfaces qui l’accueillent. Son titre est donné en référence à la Svalbard Global Seed Vault, une crypte bétonnée située en plein cœur d’un archipel de l’Arctique dans laquelle sont conservées des milliers de graines issues de cultures alimentaires diverses. Digne des plus grands scénarios catastrophe, la crypte assure à l’Humanité sa perdurance – vaine ? – en cas de cataclysme écologique. Bunker parmi les déserts de glace norvégiens, il symbolise la rupture entre l’être humain, quasiment acquis à son effondrement, et les écosystèmes terrestres et marins. En reprenant cette figure dans son installation, Jonathan interroge les rapports complexes noués entre l’être humain et son environnement. Il exprime la vulnérabilité de la Nature, dans une ambiance pré-apocalyptique qu’il épice volontiers de références ancrées dans l’anthropocène. 

Sophie Bernal

Jonathan Bréchignac, SVALBARD PETRI, Dimensions variables, 2018 (Boîtes de Pétri, fragments (végétaux, minéraux et animaux), résine, leds)
Jonathan Bréchignac, SVALBARD PETRI, Dimensions variables, 2018 (Boîtes de Pétri, fragments (végétaux, minéraux et animaux), résine, leds)
Jonathan Bréchignac, SVALBARD PETRI, Dimensions variables, 2018 (Boîtes de Pétri, fragments (végétaux, minéraux et animaux), résine, leds)
Jonathan Bréchignac, SVALBARD PETRI, Dimensions variables, 2018 (Boîtes de Pétri, fragments (végétaux, minéraux et animaux), résine, leds)

JONATHAN BRÉCHIGNAC BIOGRAPHIE
Jonathan Bréchignac est né en Provence en 1985.
Il vit et travaille à Paris.
Il est diplômé de l’École de Recherche Graphique ERG (Bruxelles).
https://jonathanbrechignac.fr