MYRIAM MIHINDOU, SILO

MYRIAM MIHINDOU, SILO

Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny

EN DIRECT / Exposition Silo exposition monographique de Myriam Mihindou,
Jusqu’au 19 septembre 2021, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges

Commissariat : Julie Crenn

Texte de Laurence Gossart

C’est une entrée dans l’intimité la plus fine, la plus personnelle, ancrée dans son histoire et ses secrets que, étayée de la complicité de Julie Crenn, Myriam Mihindou offre à l’expérience, c’est-à-dire, à voir, à sentir, à réfléchir, à percevoir, mais à éprouver surtout. Il a fallu fouiller dans les archives, les films et photographies, les traces performées d’instants fragiles rendus pérennes d’un éphémère qui dure ou disparaît, pour construire cette présentation rétrospective, temps qui déjà conduit vers un ailleurs et se laisse deviner.

Un processus alchimique de transformation de la matière réelle comme spirituelle attend le spectateur pris dans la révélation lumineuse d’une pratique qui s’inscrit et s’écrit dans l’espace du lieu. Tout résonne à raison déraisonnée, déraisonnable. Mises en danger et tensions, douleurs et folies s’entrecroisent tout autant que s’émancipent, se densifient et se subliment dans une forme de transsubstantiation. La substance, quelle est-elle ? Du sang, de la chair, du sel, de la boue, du bois, des racines, de l’esprit, des spectres, des graines… Puisque l’exposition se nomme Silo c’est qu’il y a bien des graines quelque part, dans l’émotion, la sensation, l’inconscient, l’idée, dans tous les fils qui mènent de l’ombre à la lumière, d’un matériau brut qu’une énergie conduit vers une musique intérieure. Mais, c’est dans le fil de cuivre que, peut-être, cette dernière se révèle particulièrement. Conducteur, sublimateur, il reste associé à des valeurs ambigües et conflictuelles. Entre le plomb et l’or, dans la hiérarchie des métaux, ce métal rouge soigne tout autant qu’il est porteur d’une énergie de guerre. Traversée d’une séduction vénusienne dont la déesse marque la présence, présence parfois belliqueuse, l’exposition s’hélice sur les trois niveaux de Transpalette. Si le mot est un néologisme, il dit bien la montée spiralaire, l’énergie qui hisse le travail de Myriam Mihindou au travers des différentes cultures qui la traversent, la pétrissent, la tissent telle une étoffe. De ces télescopages surgissent régulièrement d’autres chemins secrets, d’autres fils qui se tirent entre photographies, entre noir et blanc et cibachrome, entre rouge et rayogrammes, expériences des corps poussés dans leur limites de la douleur où l’art vient soigner, dit-elle, la soigner, lui montrer les voies et faire résonner sa voix, son timbre de profondeurs dont elle l’excave. Les mots et les mythes, les mythologies et contes qui l’habitent se dissolvent, s’égrènent, s’amenuisent ou s’imposent au grès de la diffraction de la lumière dans le lieu. L’imposante aliénation terrestre installée de plain-pied dès l’entrée se délivre dans les vidéos, traces quasi immatérielles de violences charnelles. Les corps y cherchent les limites du plafond de verre, le pied la lisière de la folie, les mains l’étoffe de bas nylon, implicite de « commerce des corps » dit Myriam Mihindou. Elle se soigne par la pratique artistique, par les sculptures, modelages, la création d’images et de mots, d’images des mots, ou de mots modelés et torsadés, mûris comme des fruits à la lumière de différents soleils, ceux de la France et du Gabon qui l’originent, mais ceux du Tout-monde, celui du Tout-monde. A la fois si loin et si proche, universelle et personnelle, l’œuvre touche à tout, à tous, désigne et s’approprie des cultures et des temporalités qu’elle fait siennes, glissant du mort au vivant, de l’enfant à l’aimant.

Mais, c’est alors que… « Le soleil panse les plaies invisibles : j’aimerais faire pareil en écrivant. Le malheur n’a jamais pu effacer au fond de moi la révélation que j’ai eue très tôt de la lumière. 1» Les mots de Christian Bobin deviennent des miroirs inconnus de ceux de l’artiste, de sa pratique fondamentalement lumière. Les percées, les chemins, les arrêts, décès, emprisonnements, rebours et enlisements sont l’objet de ce silo aux graines protéiformes (sculptures, installations, vidéos, performances, photographies). De sa mise en œuvre du corps, c’est de tous les corps dont, dans le creuset de son alambic sensuel, elle se fait le curateur, au fond, le créateur.
L’univers de Myriam Mihindou se décrypte en partie, et, pour conduire le spectateur dans ce chemin de croix comme de soin, l’artiste et la commissaire ont élaboré un journal dont les liens se trouvent ci-dessous.

1 Christian Bobin, La lumière du monde, Paris, Gallimard, 2001, p. 30.

Laurence Gossart

Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny
Vue Silo exposition monographique de Myriam Mihindou, Centre d’art contemporain Transpalette, Bourges Photo Margot Montigny