DANS TOUS SES ÉTATS, DE GRÂCE !
Dans tous ses états, de grâce !
Week-end d’ouverture d’ateliers d’artistes en Occitanie, atelier de Jim Fauvet et Véronique Lamonerie, St Gaudens.
par Ernest Thinon
L’eau peut changer de forme, allant de la glace, au liquide jusqu’au gazeux et au duveteux. Elle peut se faufiler presque n’importe où, une simple fissure, une brèche lui suffisent. Elle jaillit tantôt d’une fontaine que l’on conçoit mécaniquement que d’un ruisseau. Bien souvent, elle nous tombe du ciel. L’eau nous traverse de haut en bas, une émotion la fait monter jusqu’à nos yeux et en laisse un filet qui glisse le long de nos joues.
Elle nous met dans tous nos états quand elle aussi se met dans les siens !
Ouvrir son atelier, c’est montrer un moment dans un processus de création, pas forcément fini, c’est parfois juste une émergence ou bien le retour d’une pièce exposée, sortie de son piédestal, désormais dans son plus simple appareil. Il faut regarder à nouveau ce qui était fini et n’est peut-être qu’un début, une ébauche. Dans l’atelier tout est possible, tremblotant et mouvant. Offrir une vue sur ce lieu de recherche c’est regarder la pluie tomber en pensant à toutes ses possibles formes.
Les œuvres conçues au coin du poêle et celles modelées entre la scie et le marteau sont, le temps d’un week-end, posées côte à côte, se relayant pour raconter ce qui intéresse les artistes et hôtes de ce lieu. Les matériaux varient ; bois, pâte à modeler, tissus, crayons, céramique, moulage et broderie. Malgré les aspects hétérogènes, un intérêt commun semble guider mon regard; une recherche du fragile sous des aspects rigides. Il y a en entrant un travail typographique à la mine de plomb qui forme une série de phrases retraçant les jours et les ambiances instables que fut le confinement.
Lui tenant compagnie, posée au sol, une brique dont un des angles est cassé, elle se tient là, fragile et fière. Son corps de pâte à modeler colorée semble raconter tout ce que son aspect de brique omet. Tandis que la sculpture modelée s’affirme dans toute sa couleur et rigueur, en m’avançant encore un peu dans l’atelier, ce sont des soucoupes volantes en porcelaine qui m’attirent. Elles sont posées, presque chancelantes et pourtant leur matériau est de ceux qui durent toute une vie et dont on retrouve aujourd’hui des fragments datant des siècles passés. L’assemblage de ces assiettes en soucoupes volantes évoque leur potentiel volant mais aussi leur potentielle brisure ; si l’une d’elle décollait la chute et son éclat seraient aussi merveilleux que l’envol.
Chacune des pièces semble marquer un temps, un moment, un changement. L’atelier révèle toutes les facettes des éléments disposés.
Nous avons brisé la glace et nombreux furent les éclats de chaleur qui surgirent.
Ernest Thinon