GIL DELINDRO, THE SOUND OF AN EARTHQUAKE CONTAINED IN A ROOM

GIL DELINDRO, THE SOUND OF AN EARTHQUAKE CONTAINED IN A ROOM

EN DIRECT / Exposition The Sound of an earthquake contained in a room, exposition personnelle de Gil Delindro jusqu’au 29 mai 2022, Le Creux de l’Enfer, Centre d’art contemporain de Thiers

Par Pauline Lisowski

Au centre d’art Le Creux de l’Enfer, nous faisons l’expérience d’un paysage, marqué parfois par les bruits de la rivière la Durolle. À l’Usine du May, les œuvres de Gil Delindro composent un orchestre de sons, témoins de différents milieux géologiques. Explorateur, globetrotteur, l’artiste développe un travail sonore et multimédia. « Ma pratique a toujours été basée sur la recherche de champs sonores dans des endroits éloignés et des conditions météorologiques extrêmes à travers le monde. » explique-t-il.

En s’approchant de chaque pierre, nous sommes attirés par le mouvement circulaire que dessine la brindille qui l’effleure, un microphone. Son lent déplacement nous donne l’envie de découvrir les propriétés des roches issues d’Auvergne et de différentes contrées, telles des matières, indices du passage du temps. Plus nous observons le chemin de cette fine branche et le contact des matières entre elles et plus nous concentrons notre attention sur l’atmosphère sonore qui règne dans l’espace d’exposition. Chacune des pierres incite à songer à l’histoire, à la transformation de milieux à la fois proches et lointains. À travers le titre Cartographies, cette installation traduit les qualités des lieux que l’artiste a arpentés. 

L’écoute nous conduit à une observation attentive… Les différents sons, provenant de diverses contrées de la planète, nous transportent dans un nouveau territoire. « Le son est pour moi un moyen de m’ouvrir à l’unicité de chaque paysage, de comprendre que le paysage lui-même est en constante évolution, différent d’un jour à l’autre. Ce genre de pratique me permet d’expérimenter directement les qualités éphémères et immatérielles de chaque lieu, saison, météo. » précise en effet l’artiste. Au mur, un dôme de couleur rouge-orangée constitue également un étrange instrument tournant sur lui-même. Cette sculpture s’apparente à une planète, à la lune… En observant sa rotation, nous nous attardons alors sur la matière qui la constitue, de la pouzzolane et des pigments volcaniques.

Dans la salle suivante, une vibration sonore émane d’une installation composée d’un support en liège sur lequel des milliers de tiges en bois réagissent à partir d’un enregistrement de fréquences sismiques, inaudibles pour nos oreilles. Cette œuvre cinétique fascine par son mécanisme et par les réactions sonores qui proviennent des mouvements de chaque élément qui la constitue. Le phénomène invisible est ici amplifié et notre corps ressent une secousse, surgissant des profondeurs de la terre.

En revenant dans la première salle, le paysage sonore nous attire à nouveau vers chaque pierre. Tel un voyage immobile, en nous déplaçant dans l’espace d’exposition, nous pouvons nous interroger sur le passé et le futur des lieux aux conditions extrêmes que l’artiste a exploré : « Le son me permet de regarder le monde dans son ensemble, en étant pleinement conscient de tous mes sens et en n’ignorant pas les détails subtils ou les couches invisibles. » me confie-t-il.

Le son ne serait-il pas un indice de possibles transformations à venir de certains milieux naturels ? En l’écoutant ne percevons-nous pas leur fragilité ? Ces questions nous engagent à prendre conscience des effets des bouleversements météorologiques, qui modifient les paysages. « Le son est par nature dépendant d’un segment de temps, il « se produit » et « disparaît » constamment en même temps, il nous permet donc également de développer une sorte de conscience et de se concentrer sur « l’ici et maintenant ». », cette pensée de l’artiste nous engage à prêter plus d’attention à chaque son, qui peut nous transporter vers un ailleurs. Ainsi, les œuvres de Gil Delindro nous amènent à aiguiser notre sens de l’ouïe, sens qui nous ouvre pleinement au monde qui nous entoure. 

Pauline Lisowski

Gil Delindro, Camouflage, 2022. Pouzzolane, pigments volcaniques (oxyde de fer), dôme, moteur, microphone, enceinte
Gil Delindro, Camouflage, 2022. Pouzzolane, pigments volcaniques (oxyde de fer), dôme, moteur, microphone, enceinte
photo : Vincent Blesbois
Gil Delindro, Cartographies #8 45.708401,2.958665, 2022. Pierre volcanique collectée en France (Puy de la Vache, Auvergne), microphone et enceinte
Gil Delindro, Cartographies #8 45.708401,2.958665, 2022. Pierre volcanique collectée en France (Puy de la Vache, Auvergne), microphone et enceinte
photo : Vincent Blesbois
Gil Delindro, Cartographies #7 56.053947,-2.639059, 2022. Rocher collecté en Ecosse (East Lothian), microphone et enceinte
Gil Delindro, Cartographies #7 56.053947,-2.639059, 2022. Rocher collecté en Ecosse (East Lothian), microphone et enceinte
photo : Vincent Blesbois
Gil Delindro, Cartographies #6 54.9769633, -1.3755675, 2022. Rocher collecté au nord de l'Angleterre (South Shields), microphone et enceinte
Gil Delindro, Cartographies #6 54.9769633, -1.3755675, 2022. Rocher collecté au nord de l’Angleterre (South Shields), microphone et enceinte
photo : Vincent Blesbois