On mange quoi ce soir, en 2060 ?

On mange quoi ce soir, en 2060 ?

AUTOUR DE L’EXPOSITION / On mange quoi ce soir, en 2060 ?
présentée jusqu’au 26 septembre 2020 à La Cuisine, centre d’art et de design de Nègrepelisse

AUTOUR DE LA ZONE
comment s’outiller pour penser le futur?

par Sarah Mercadante

En général, une exposition suppose une proposition de format. On y choisit l’ensemble des paramètres qui étayent ce qui est donné à voir, à écouter et à penser aux futur·e·s spectateur·ice·s.

Le parcours proposé, dans une succession d’oeuvres, induit une attitude anticipée chez le spectateur. Vous serez flâneur·euses, assidu·es, hésitant·es, contemplatif·ves, peu importe, vous choisirez sûrement l’option qui relie l’entrée à la sortie, en traversant le dédale de salles ou en slalomant d’une oeuvre à l’autre.

Certains projets ont un statut particulier. Ils proposent aux visiteur·euses d’interagir avec leur contenu. C’est le cas des oeuvres dites participatives – le public est impliqué dans la réalisation du contenu, en amont ou pendant la présentation, et devient alors un·e acteur·ice à part entière – ou interactives – c’est la présence des visiteurs qui déclenche l’oeuvre.

L’exposition « On mange quoi ce soir, en 2060? », réalisée par le collectif LA ZONE (composé des artistes Sharon ALFASSI, Seumboy VRAINOM : € et de l’historien de l’art François CAM DROUHIN)1, que j’ai visitée en juillet 2020, a réveillé chez moi une interrogation forte concernant ces catégorisations.

Leur proposition artistique est une capsule temporelle, un lieu où l’on nous demande, ici et maintenant, d’imaginer ce que sera le futur de l’alimentation et des habitudes culinaires. Pour nous y aider, le collectif a choisi de soumettre à notre appréciation plusieurs récits. Réels, par des témoignages d’habitant·e·s du village, enregistrés durant une résidence sur place et restitués dans un vidéo-montage simulant un visionnage sur smartphone. Fictifs, par des captures filmées de personn-ag-es lisant à haute-voix des textes d’assemblage de citations musicales, philosophiques, sociologiques ou encore ethnologiques – Stromae côtoyant Franz Fanon2.

Concrets, avec des ouvrages consultables qui prolongent et ouvrent la question centrale. Des panneaux de tissu, suspendus au plafond, ponctuent l’espace et portent ce matériel textuel en lettres capitales blanches sur fond rouge, comme des rappels à maintenir son attention sur les problématiques de l’exposition.

J’ai ressenti la volonté du collectif de me faire entrer dans le jeu qu’il me propose, Il m’a captée et enjointe à suivre un Procès  : assieds toi, écoute, regarde et lis. On m’a donné la clé de la porte qui me fait face, je n’ai plus qu’à entrer. Pour autant, il n’y a pas de plan défini, pas de bon  chemin à prendre, pas d’issues fatales ou au contraire de réussite parfaite.

On m’a laissé fouiller, prendre des photos, manger toute la nourriture. A moi de me/m’en servir à bon escient, à moi encore de digérer tout ce que j’ai englouti.

C’est donc volontairement que je n’opte pas pour une approche esthétique du projet qui, selon moi, ne permet pas de restituer le message du collectif.

J’ai choisi de laisser germer la graine que LA ZONE a déposé dans mon cerveau, dans mon corps, et de livrer par ce texte le mélange d’espoir infini et de réalité franche que cette création – passeuse d’apprentissage, impulsion électrique – apporte.

A mon tour, je vous fais une proposition qui constitue ma contribution au projet. A vous d’en retenir l’entièreté, ou simplement quelques bribes.

***

Entendre le flot des paroles, d’informations diverses et changeantes. Voir la succession infinie des images, ne plus y prêter attention.
Vacances, célébrations, plats réjouissants.

J’ai 11 ou 12 ans. Je croque avidement dans une pêche. Le jus, le sucre, la légèreté du moment, la chaleur de l’été.
Je regarde le fruit, plus qu’entâmé, à la recherche des dernières parcelles de chair. Vision de son noyau, fendu en deux. A l’intérieur se meut un pince-oreille.
Le dégoût puis, des années plus tard, toujours cette appréhension d’un éventuel intrus qui se niche au cœur de mon plaisir estival.

Écouter les discours, les mots choisis et pesants.
Regarder les clichés photographiques qui circulent, ne plus voir que ça. Pandémie, questionnements, perturbateurs endocriniens.

Ces informations, on les cherche, mais parfois, ce sont elles qui nous trouvent au détour d’une conversation, dans un magazine qui traîne. Et ces quelques mots vite attrapés se greffent en nous et travaillent à bas bruit. Et puis ça resurgit. Quelques clics, des mots-clés : on pose des questions, on va jusqu’au débat. Posture obsessionnelle où les échos des discours, les traces des images ne cessent de nous agripper.

La crainte, l’angoisse, ces sentiments qui nous font dire « Je préfère ne pas savoir, ne pas voir, ne pas entendre », « c’est anxiogène », « ça ne suit pas l’ordre des choses ». On prend la fuite ou on se construit des boucliers. Que ça ne nous atteigne plus !

L’incompréhension, l’injustice, le fait de se sentir démuni : on dit alors « qu’est ce que je peux faire ? », « il faut que je change mes habitudes ». On peut choisir de se replier quand les réponses au « quoi » et au « comment » nous paraissent complexes, perturbantes.

Dans les deux cas, notre attitude – active, passive ou indifférente, défensive ou explicative – changera peut-être le flux de nos émotions mais laissera le problème intact et le choc à la réalité persistant.

***

A l’été 2020, toute la planète attend, fébrile, de savoir si la pandémie de Coronavirus (la COVID 19) va jouer les prolongations cet automne et nous faire vivre à nouveau un confinement total, partiel, on ne sait plus trop quoi .

C’est donc masqué, le flacon de gel hydroalcoolique dans le sac, que les vacanciers ont commencé à circuler (avec tout de même des injonctions gouvernementales à rester « modeste » dans ses déplacements).

Cette situation est inédite, personne ne sait vraiment comment penser le futur. Peut-on reprendre nos déplacements internationaux pour le tourisme? Pour le réseau professionnel? Pour les échanges commerciaux?

Dans ce contexte confus, l’exposition « On mange quoi ce soir, en 2060? » permet d’aborder les événements à travers un prisme concret : l’alimentation. En posant son attention sur ce qu’il y a dans nos assiettes, et faire un bond de 40 ans en avant, la réflexion devient projective, spéculative. Elle est nourrie de nos habitus et des fantaisies cinématographiques ou littéraires qu’on a croisées jusque-là. On peut aussi se référer à certaines situations issues des films de science-fiction.

Sur la forme d’abord, avec deux scènes où la nourriture, miniaturisée, encapsulée, se transforme. Dans « Retour vers le futur 2 », une mini-pizza ressemblant à une réplique de dinette, devient fumante et savoureuse une fois passée au “réhydrateur”. Dans « Le cinquième élément », des pilules se transforment en poulet rôti juteux avec son lot d’accompagnements, après deux secondes au « micro-onde ». Deux visions d’un futur fantasmé. 2015 et 2263 respectivement vues depuis les années 1989 et 1995.

Sur les habitudes « à table » et la manière de se nourrir, le réalisateur Terry Gilliam, en 1985, propose dans « Brazil » une scène de restaurant où les plats à la carte n’ont plus de nom, seulement des numéros. Une fois servis, on voit dans les assiettes des plats identiques, sortes de boules de purée verdâtre, placées à côté d’une image du mets envisagé.

Dans « Blade Runner 2049 », sorti en 2017, c’est le concept de « nourriture holographique » qui suggère les plats. Ou comment superposer sur un bol de nouilles insipide l’image d’un steak frite réconfortant.

Dans la vidéo centrale de l’exposition, j’ai entendu des récits hypothétiques qui m’ont laissée pensive : se nourrir exclusivement d’insectes, ingérer des aliments déshydratés, comme ceux des cosmonautes, manger seul.e et rapidement. Toutes ces visions restent finalement proches des narrations rétrofuturistes des années 70 et 80.

***

Face à un futur incertain, l’esprit s’écarte spontanément des réalités tangibles et des hypothèses réalistes pour aller puiser dans des répertoires inédits, quand bien même les pratiques actuelles laissent déjà entrevoir à quoi l’agriculture, l’élevage et la nourriture de demain pourraient ressembler.

En 2020, les étals des supermarchés ne comportent toujours pas de super-aliments déshydratés. Les légumes et les fruits poussent en pleine terre et se retrouvent, frais, dans les allées des marchés. Les éleveurs sont encore à la tête de troupeaux de bétail – parfois en stabulation plutôt qu’en plein air. Les restaurants sont toujours fréquentés et les repas de famille sont toujours au programme.

2060 aura bien lieu, et c’est demain.

L’ADEME (Agence de l’Environnement Et de la Maîtrise de l’Energie), actualise annuellement ses scénarios « Énergie Climat » pour la période 2030-2050, preuve que les actions d’aujourd’hui importent déjà fortement les trente prochaines années. Leur « vision prospective proposée […] ne repose pas sur un changement radical de mode de vie, une baisse du confort ou sur le pari de ruptures technologiques fortes »

Réfléchir au futur, c’est donc interroger nos pratiques quotidiennes : qu’est ce que j’achète? D’où viennent les produits que je consomme? Comment est-ce que je peux me procurer tel aliment dans mon supermarché?

De ces questions, une vision, de globale à très affinée, des perspectives sur quarante ans est accessible, et elle esquisse un futur bien plus concret qu’on ne le pense.

Je me suis prêtée, à l’occasion de l’écriture de ce texte, à une recherche dont je vous livre ici les résultats. La méthodologie en est relativement simple, basée sur une revue (non-exhaustive) de la littérature existante.

J’ai relevé durant la pandémie de COVID-19, que le terme de « souveraineté nationale » avait refait surface de manière explicite chez nos dirigeants.

Pourquoi?

De nombreux produits de consommation courants sont importés, puisque non produits sur le territoire français. Ils viennent de Chine, d’Indonésie, de Taïwan, du Bangladesh, du Kazakhstan, du Pérou, d’Israël, d’Afrique du Sud. Des heures de bateau, d’avion, de poids lourds, pour garnir les étals de nos magasins. C’est aussi vrai à l’échelle européenne, où la circulation des productions locales est régulée et soumise à de multiples normes.

Pour limiter l’expansion du virus, de nombreuses voies commerciales ont été coupées. L’organisation de la production sur le sol français a révélé des manques, en partie liés à la fermeture d’usines, années après années, entraînant une dépendance accrue à l’importation. Dans le pays où l’agriculture, et à fortiori la production de céréales, est un axe majeur de son développement à l’échelle mondiale, la farine est restée aux abonnés absents pendant de longues semaines.

Devant cette situation, nous avons parfois ironisé, en se demandant si vraiment, tous les français·es s’étaient mis·es au fourneau, à faire leur propre pain, leurs pâtes maison, des tonnes de gâteaux.

J’ai tenté d’en comprendre la raison à travers un parcours jalonné par de nombreuses données statistiques, de causes complexes et interdépendantes.

 J’ai donc pris comme point de départ la production de blé français et la répartition des récoltes. En 2018, la France a produit 34 million de tonnes de blé tendre, principale céréale cultivée, avec 54% du total des surfaces agricoles utilisées. Cela en fait donc le principal producteur européen. Pour la campagne de commercialisation 2018-2019, 44% de la récolte a été destinée au marché intérieur (17 321 millier de tonnes) : alimentation animale (7 248), consommation humaine et usages industriels (8 690)

Puis, que fait-on du blé? 14% va à la meunerie, 12% aux industries de l’alimentation animale; 7% aux amidonneries et glutenneries; 4% à la fabrication d’alcool (dont bioéthanol) La farine? 34,6% pour les boulangeries et pâtisseries artisanales; 28,2% pour les industries utilisatrices (biscuiterie, biscotterie et industries alimentaires); 21,5% pour les boulangeries et pâtisseries industrielles; 5,8% pour les ateliers de boulangerie et pâtisserie en grandes surfaces; 4,9% pour les sachets de farine ménagère.

Nos sachets de farine étant donc minoritaires dans la chaîne de production, et ayant subi une hausse de la demande des consommateurs, il me semble alors logique que ce soit un des produit qui ait disparu le plus vite.

J’ai passé plusieurs heures à rechercher, en suivant mon raisonnement, des articles, des sources, qui nourriraient mon hypothèse. Là, les écrits se raréfient, ils deviennent moins « officiels ». Les articles sourcent des interviews, des discours, d’autres articles. Et il reste complexe de livrer une version condensée et pertinente des résultats.

Une des raisons de cette pénurie de sachets de farine serait notre dépendance au marché des petits conditionnements, et en conséquence de nos besoins d’importation d’Allemagne ou d’Italie, car les stocks français sont fléchés prioritairement vers les industriels.

 Une autre raison tient au fait des accords financiers franco-allemands en terme d’échange et par ailleurs des ententes sur le territoire national entre meuniers français.

Au-delà de ces explications, les échanges autour du blé ont toujours été un enjeu géopolitique que relève l’ouvrage « Géopolitique du blé » d’ailleurs présent au sein de l’exposition « On mange quoi ce soir, en 2060? » :

 « Le blé […] incarne à quel point une matière première alimentaire détermine la sécurité mondiale et l’évolution des relations de pouvoir entre les rares pays qui en produisent et ceux, bien plus nombreux, qui ont recours aux marchés internationaux pour satisfaire leurs besoins. Car c’est avec le blé que l’alimentation de base des populations s’est construite dans le temps. Quand il vient à manquer, c’est l’agitation et la peur. Il retrouve, le cas échéant, toute sa centralité politique. Le blé entre chaque jour dans la vie de milliards d’individus. Alors que sa consommation se mondialise, il reste très inégalement réparti sur la planète. Face à ces dynamiques sociodémographiques et à ces disparités territoriales, le rôle du commerce s’amplifie et les stratégies des acteurs s’affirment. Aux défis de sa production s’ajoutent ceux du transport et des investissements nécessaires pour que les récoltes en blé puissent suivre la progression de la demande et anticiper les prochaines ruptures climatiques ou géopolitiques. »

La force du projet du collectif LA ZONE comme structure de réflexion, m’a permis d’envisager la question de la disparition soudaine de la farine comme un marqueur d’un produit nécessaire en cas de crise, comme une ressource qui cristallise un équilibre précaire, que modifier un des paramètres de sa production a un impact remarquable.

Ainsi l’exposition permet de se ménager le recul nécessaire pour éviter le sens commun et les explications intuitives au profit de logiques pensées dans une perspective socio-économique et symbolique.

***

Il est rare de croiser sur son chemin des initiatives qui organisent un temps de questionnement et offre, librement, des outils qui le soutiendront sur le long terme. J’insiste bien sur les termes : librement, c’est à dire accessible gratuitement, sans limite de temps – en considérant, bien sûr, que l’exposition comporte un début et une fin, et des horaires d’ouverture – dans un lieu identifiable et facile d’accès depuis un centre-ville.

Car ce savoir que LA ZONE rend possible, iels l’adressent à un large public, iels le redistribuent. En faisant cohabiter, dans un même lieu, des adresses aux habitants de Nègrepelisse et une bibliographie pointue, iels tendent le micro et font exister toutes les voix dans un même espace-temps. Autrement dit, toutes les interrogations partent de l’observation d’un espace commun et partagé – la Terre – et chaque vécu alimente des domaines vastes susceptibles de cohabiter avec des éléments de recherche et de réflexion parfois inaccessibles du fait de la distance géographique, du temps biologique, de l’accès aux informations.

Les données consultables, chiffrées, visibles contribuent à réordonner et à donner du sens face au manque de transparence du flux complexe de l’information, parfois hermétique, parfois aussi coupé de ses protagonistes et de ses contemporains.

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« On mange quoi ce soir, en 2060? », depuis un monde où nos sens ont encore besoin de matière à mâcher, d’odeurs inscrites dans nos souvenirs et de couleurs « naturelles ».

Si les visions populaires et futuristes ne sont que des chimères, les conjonctures actuelles peuvent orienter une lecture plus outillée de ce qui attend les populations mondiales.

Mais la réalité dépasse parfois la fiction. Et il suffit d’ajouter un filtre, un bel emballage, pour faire ressembler une image à la réalité… ou pour ancrer la fiction dans le réel.

Un dossier de l’Insee, rédigé en 2015 et intitulé « Cinquante ans de consommation alimentaire : une croissance modérée, mais de profonds changements » note que « la viande, les fruits et légumes, les pains et céréales […] cèdent du terrain aux produits transformés et aux plats préparés. »9 Les français·es mangent donc plus de produits ultratransformés, aux prix tirés à la baisse par un marché très concurrentiel. Mais pour baisser les prix, pas de recette miracle si celui des produits de base ne fluctue pas, voire augmente.

La première solution est simple : on se débarrasse des produits de base en recréant un aliment  de toute pièce par la chimie. Ce « ne sont pas des aliments modifiés, mais des formulations faites, principalement ou entièrement, de substances dérivées d’aliments et d’additifs, avec peu, voire aucun aliment non transformé ou naturel.»10 La composition sera alors identifiable par la présence majoritaire de caséine, lactose, lactosérum, gluten, protéine de soja, sirop de maïs, colorants, arômes, exhausteurs de goût, etc.

Une sorte de coquille vide, qui ressemble à du vrai, qui peut avoir le goût du vrai, mais qui n’est au final qu’une vague interprétation par les papilles et l’odorat d’un produit connu.

En novembre 2019, BBC News publiait un article11 reprenant un communiqué du Ministère de l’Agriculture russe évoquant l’expérimentation de casque de réalité-virtuelle sur un troupeau de vaches de la RusMoloko farm. Cette technologie, adaptée à la vision des couleurs altérées des vaches, est censé suggérer un pré estival, restituant herbe verte et lumière chaude. L’expérience montrerait ainsi que les animaux, moins stressés, produiraient un meilleur lait.

Une alternative à la réalité des prairies évoluant au fil des saisons, ou des stabulations ternes, pour tenter de rendre leur lait meilleur ?

Dernier exemple, l’investissement grandissant des politiques publiques dans les projets d’hydroponies, autrement dit des cultures hors-sol, sur les toits des bâtiments. Les plants sont installés dans des pots chargés de billes d’argile pour subir un arrosage permanent d’eau contenant les nutriments et les sels minéraux requis pour leur croissance.

Le toit de l’immeuble de la RATP à la Place Lachambeaudie, à Paris, accueille progressivement depuis mars 2017, sur l’initiative de la start-up Aeromate®, des légumes, des fruits et des plantes aromatiques cultivés par cette technique sur 450 m².12

Ce type d’initiative est une alternative réelle à l’agriculture classique puisqu’elle permet la production et l’autonomie locale en milieu urbain.

Il n’est pas question de critiquer d’emblée ces méthodes. L’apport de la science et de la technologie à la filière agro-alimentaire est incontestable.

J’ai souvent le réflexe de rester hermétique aux domaines qui cherchent des alternatives à des processus naturels, surtout quand la possibilités de ne pas y avoir recours existent en simultané. Je suis prête à foncer, tête baissée, dans une contestation du système libéral et consumériste qui, pour moi, régit l’ensemble des mécanismes actuels.

L’exposition que j’ai visité à La Cuisine me fait entrevoir autre chose. C’est encore un peu flou mais je le livre ici dans sa forme brute.

Et si la question était plutôt de se projeter, par les informations que l’on reçoit en masse, dans le futur que l’on souhaite plutôt que dans celui qu’on nous dépeint. Je ne veux pas dire qu’on doit affabuler, non. Partir d’éléments réels, de ce qui se déroule sous nos yeux, et se demander ce que ça provoque en nous.

Si avec ces informations, et en vous posant à nouveau la question « Qu’est ce qu’on mange ce soir, en 2060? » vous avez imaginé le pire, c’est à dire, la représentation qu’il vous serait insupportable de voir éclore, alors essayez de vous déplacer dans ce tableau, changez les objets de places, permutez les protagonistes. Demandez-vous : pourquoi ces gens sont là? quelles sont les options qu’ils ont dû écarter pour en arriver là? ont-ils l’obligation de faire ce qu’ils font?

Comprendre les interactions qui s’opèrent est plus qu’un pas à franchir, c’est prendre la décision de regarder les choses en face, et de prendre le risque de dire ce qu’on ressent. Puis se positionner : ça me touche / ça m’est égal / c’est insupportable.

Si ça vous aide, faites-le avec un verre de vin. Si ça vous aide, faites cet exercice à plusieurs, en famille, entre amis. Ecoutez-vous, riez, ne soyez pas d’accord, mais laissez les questions vous provoquer. Car peut-être qu’un début de réponse pourrait émerger ici, maintenant, entre vos mains.

Sarah Mercadante
Eté 2020

1 « On mange quoi ce soir, en 2060 », collectif LA ZONE, sur l’invitation de Marta Joinville, directrice, du 11 juillet au 26 septembre 2020, La Cuisine, Nègrepelisse. http://www.la-cuisine.fr/exposition-collectif-la-zone#.X0KDRy3M1E4
2 Stromae est un auteur-compositeur-interprète et producteur belge. Sa musique est classé comme Hip-hop/Rap. Son 2ème album « Racine carrée » lui assure une reconnaissance mondiale en 2013.
Frantz Fanon (1925 – 1961), est un essayiste et médecin psychiatre français, militant anticolonialiste. Ses essais Peau noire, masques blancs (Paris : Seuil, 1952), L’an V de la révolution algérienne (Paris: François Maspero, 1959), Les damnés de  la  terre  (Paris: François Maspero, 1961) et Pour  la  révolution  africaine; écrits politiques (Paris: François Maspero, 1964), le place comme un penseur pionnier de la question noire et des dérives du système colonial dans son ensemble. En 2011, 50e anniversaire de sa mort, La Découverte réédite son oeuvre, accompagné de la traduction française de sa biographie, rédigée par l’historien britannique David Macey.
3 Le confinement, en France, est une mesure sanitaire mise en place du 17 mars au 11 mai 2020 (55 jours, soit 1 mois et 25 jours) qui s’insère dans un ensemble de politiques de restrictions de contacts humains et de déplacements en réponse а la pandémie de Covid-19. Au niveau mondial, le confinement a été mis en place dans au moins 42 pays et territoires dans le monde. Concernant la pandémie, voir les outils de visualisation de son évolution mis en ligne par Le Monde le 5 mai 2020 et actualisé quotidiennement : https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2020/05/05/coronavirus-age-mortalite-departements-pays-suivez-l-evolution-de-l-epidemie-en-cartes-et-graphiques_6038751_4355770.html
4 “Les scénarios 2030-2050”, ADEME, mis à jour le 29/07/2020. Consultable sur https://www.ademe.fr/lademe/priorites-strategiques-missions-lademe/scenarios-2030-2050
5 « Produits agroalimentaires. Céréales, oléagineux, protéagineux » GraphAgri 2019, paru le 20/12/2019. Consultable sur https://agreste.agriculture.gouv
6 Pour tous les détails sur la filière céréalière, voir l’édition 2019 – l’essentiel de la filière, publiée par « Passion Céréales » et téléchargeable sur https://publications.passioncereales.fr
7 « Farine en sachet vendue dans la grande distribution », Autorité de la concurrence, 13 mars 2012. Consultable sur https://www.autoritedelaconcurrence.fr/fr/communiques-de-presse/13-mars-2012-farine-en-sachet-vendue-dans-la-grande-distribution
8 Sébastien Abis, « Géopolitique du blé: un produit vital pour la sécurité mondiale. Iris éditions, 2015
9 « Cinquante ans de consommation alimentaire : une croissance modérée, mais de profonds changements » Brigitte Larochette et Joan Sanchez-Gonzalez, division Synthèses des biens et services, Insee, 2015. Consultable sur https://www.insee.fr/fr/statistiques/1379769#consulter
10 Sur la classification des aliments, voir l’article « Food classification. Public health NOVA. The star shines bright », publié dans « World Nutrition Volume 7, Number 1-3 », janvier-mars 2016. Consultable via https://archive.wphna.org/wp-content/uploads/2016/01/WN-2016-7-1-3-28-38-Monteiro-Cannon-Levy-et-a l-NOVA.pdf
11 « Russian cows get VR headsets ‘to reduce anxiety’ », BBC, 27 November 2019, consultable via https://www.bbc.com/news/world-europe-50571010
12 Sur la question : h ttps://agriculture.gouv.fr/aeromater-la-start-qui-cultive-les-toits-de-paris et https://www.ratprealestate.com/nos-actualites/inauguration-de-ferme-lachambeaudie/

Le collectif La zone lors de sa résidence à Nègrepelisse
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AUTOUR DE L’EXPOSITION / On mange quoi ce soir, en 2060 ? présentée jusqu’au 26 septembre 2020 La cuisine centre d'art et de design #negrepelisse
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Plus d’infos sur l’exposition :
http://www.la-cuisine.fr