Jérémy Gobé, Dans les sols, l’avenir peut-être
Exposition Dans les sols, l’avenir peut-être, exposition personnelle de Jérémy Gobé, Rurart, Venours. Crédit photo : Rurart
EN DIRECT / Exposition Dans les sols, l’avenir peut-être, exposition personnelle de Jérémy Gobé, Jusqu’au 26 juin 2022, Rurart, Venours
Par Pauline Lisowski
Après s’être intéressé au patrimoine d’usines textiles, Jérémy Gobé s’engage pleinement envers la régénération du corail. Il coopère avec différents corps de métiers afin d’envisager de nouvelles solutions pour lutter contre le blanchiment des récifs coralliens. Chacun de ses projets l’amène à expérimenter des matériaux éco-conçus et à développer l’utilisation de la laine pour créer des œuvres monumentales.
Invité à exposer à Rurart, l’artiste découvre cinq fossiles du Poitou, d’où démarre une nouvelle aventure, la création d’un motif témoin de l’ère géologique du dévonien. Cinq impressions 3D de coraux nous accueillent, indices de ces trouvailles. Semblable à un paysage des profondeurs marines ou bien de cavités d’une grotte, son installation Dans les sols, l’avenir peut-être propose un voyage à la découverte de formes étranges. Presque dans l’obscurité, des monticules de laine paraissent à la fois s’ériger et s’affaisser, tel un état des lieux entre-deux qui invite à se raconter de possibles récits. Pour les réaliser, il a collaboré avec l’atelier Maille Emma, situé à Clamart, spécialisé dans le tissage de fils de laine recyclés issus des déchets de l’industrie de la mode.
À la fois monumentale et suggérant une force de la nature, son œuvre in situ apparaît souple et suscite une impression de douceur. Elle invite au toucher et à la frôler, comme pour ressentir des sensations au contact de roches. Celle-ci n’est-elle pas friable, ne va-t-elle s’éroder ? Par endroit, elle semble repousser les limites de l’espace d’exposition. La laine incarne une certaine force de tenue tout comme elle répond au volume qu’elle recouvre.
La composition sonore créée par Julie Rousse, intitulée Small Beings, renforce l’atmosphère mystérieuse de l’exposition : des sons d’êtres vivants qui habitent les océans. Peu à peu, notre regard s’habitue au peu de lumière et notre corps ressent un certain plaisir à déambuler, à s’enfoncer dans les passages créés par les excroissances de ces immenses roches de laine. Par l’expérience et la confiance que nous nous accordons au fur et à mesure de l’exploration de l’exposition, nous pouvons nous interroger sur les divers paysages qu’elle convoque.
Comme l’énonce Jérémy Gobé, « les coraux sont les poumons de notre planète, ils absorbent le C02 pour produire de l’oxygène, et ce à une échelle vitale pour la vie terrestre ». Une vidéo présente son projet Corail artéfact, entre art, science et industrie. L’artiste, investi dans une dynamique de transmission, nous invite alors à prendre conscience de la fragilisation de ces animaux marins et de la nécessité d’approfondir nos connaissances pour mieux les préserver.
Son exposition fait appel à la mémoire du patrimoine textile ainsi qu’à celle des sols de la région. Elle parle autant à ceux qui habitent ce territoire qu’à d’autres visiteurs qui y découvrirons diverses formations ou différents phénomènes naturels, vers le sol ou vers le ciel. La force du travail artistique de Jérémy Gobé tient de son approche expérimentale des matériaux et de son ambition de témoigner au plus grand nombre des enjeux et problématiques actuelles.
