CAROL LEVY, JAYSALMER

CAROL LEVY, JAYSALMER

FOCUS / Installation Jaysalmer de Carol Levy sur la façade de Modulo Atelier, Esquelbecq

La construction est – comme l’espace de la fenêtre qu’elle occupe – un passage ; ce passage se fait par la surface vitraillée commune , un vitrail qui côté rue est un élément de décoration et qui à l’intérieur devient un vecteur de sensation.

Pourquoi ce titre de « Jaysalmer » ?

Ma première idée était de transplanter à Esquelbecq un morceau de palais indien. Le projet est soutenu par la région des Hauts de France et au moment où je rédigeais le dossier pour postuler à une aide à la création je séjournais dans le fort de Jaysalmer au Rajasthan. 

Jaysalmer est une ville irréelle dans laquelle les échanges, emprunts, imitations, fusions ont donné à la forme et au styles architecturaux leur sophistication. Les influences sont nombreuses , religions, commerces et invasions ont apporté des éléments artistiques de Chine, d’Inde, d’Occident, de Perse. 

« Jaisalmer » aurait pu être une extension architecturale indienne sur le bâtiment de briques, un écho exotique décalé de la gerbière imposante et accrochée au mur de la minoterie occupée par Modulo atelier.

Mais en travaillant en face de l’église je me suis à nouveau laissé gagner par l’attrait de la proximité immédiate de ce patrimoine et c’est une architecture pseudo-gothique qui a finalement été posée dans l’encadrement de la fenêtre. 

Avec Sophie Wirtz nous avions déjà travaillé dans l’atmosphère de l’église Saint Folquin. Nous avions re-présenté les sculptures calcinées, brulées dans l’incendie de l’église en 1976 ; ces sculptures datant pour les plus anciennes du milieu du dix huitième siècle. Ce travail « Charbons ardents » aujourd’hui installé dans l’église est aussi un jeu, un glissement sémantique qui à pris la forme d’une fausse restauration pour re-présenter des sculptures ruinées sous une forme et une scénographie totalement renouvelée. 

La minoterie qui produisait de la farine jusque dans les années 80 date de 1918, sur sa façade , la gerbière qui est une sorte de cabane pour monter et descendre des sacs grâce à une poulie est emblématique de ce type de bâtiment.  « Jaysalmer » sorte de chapelle posée en vis à vis de cette gerbière est comme un rejeton engendré par la rencontre de l’église et de la minoterie. 

Mais pour pousser plus loin le programme de transformation architecturale j’ai tenté d’opposer le plus possible le côté rue et le côté intérieur ; cet envers est simultanément la continuité et l’opposée de son endroit.

Dedans la pièce ressemble aux autres cimaises de la salle d’exposition mais cette cimaise particulière peut s’ouvrir par deux volets qui révèlent une composition abstraite faite de points et de verres colorés. C’est ici qu’est l’espace principal de jeu pour la lumière, celle-ci se projette en évoluant avec la course du soleil, dans la niche, sur les volets, sur le sol avant que dans l’après midi elle ne se projette plus nulle part. 

La découverte est donc très progressive, on voit la cimaise, puis la niche qu’elle contient et la lumière qu’elle projette, on s’approche et l’on voit l’extérieur à travers les verres de couleur, enfin on découvre que l’on est derrière, comme à l’intérieur de la petite chapelle. 

Dans l’autre sens du parcours le jeu fonctionne également , on voit d’abord la construction sur la façade puis à l’intérieur on découvre l’envers du décor qui est esthétiquement tellement différent que l’on ne réalise pas tout de suite que l’installation est reliée à la construction extérieure.

Cette sculpture est visible par tous dans la cour et donc dans l’espace public mais il faudra entrer à Modulo atelier et monter au premier étage pour découvrir l’autre partie de la sculpture, j’ai une volonté de susciter la curiosité pour inciter le public à entrer, dans le contexte actuel la temporalité est encore plus marquée, puisque la partie intérieure est inaccessible, provisoirement interdite d’accès.

Le jeu est toujours un peu le même dans mon travail, il consiste à montrer très concrètement la construction pour ensuite me servir de cette fabrication laborieuse à la manière d’une contrainte et finalement aboutir à tout autre chose. Le protocole, l’idée du passage, de ce qui est caché est important pour moi, on pense avoir tout vu mais on peut finalement en voir plus ou pas.

CAROL LEVY – Biographie

Carol Levy est né en 1967 à Ostende
Il habite et travaille aujourd’hui à Esquelbecq.

MODULO Atelier
3bis rue de Bergues
Esquelbecq

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Cette installation de Carol Levy a bénéficié de l’aide à la création 2018 de la région des Hauts de France. Elle est présentée pendant toute la durée de l’exposition Botter Straete qui se terminera fin octobre et qui commencerait début juin.

Carol Levy, Jaysalmer, MODULO Atelier, 2020
Carol Levy, Jaysalmer, Modulo Atelier, 2020
Carol Levy, Jaysalmer, MODULO Atelier, 2020
Carol Levy, Jaysalmer, Modulo Atelier, 2020