Romina De Novellis, Nel Blu Dipinto Di Blu

Romina De Novellis, Nel Blu Dipinto Di Blu

Commentaire de Henri Guette sur l’installation de Romina De Novellis Galerie Alberta Pane

Nel blu dipinto di blu est la deuxième exposition personnelle de l’artiste italienne Romina De Novellis, dans l’espace parisien de la galerie Alberta Pane.

Extrait d’une conversation entre Alberta Pane et Romina De Novellis

Alberta Pane : J’ai découvert pour la première fois ton travail en 2009, pendant la foire Slick. Tu y réalisais une performance qui s’appelait Il Capitano, si je ne me trompe pas. Je m’en souviens comme d’un travail très intense. Est-ce que tu peux m’en parler?

R.D.N. : C’est difficile pour moi de répondre à cette question, car cette performance me semble être l’œuvre d’une autre personne. Mon travail a beaucoup changé depuis et moi aussi. J’ai énormément évolué comme femme et artiste.
Il s’agissait de quatre tableaux vivants représentant chacun une femme différente. La référence au Capitaine provenait d’une procession sicilienne typique qui, pendant la Semaine sainte, met en scène les arts et l’artisanat local en les exposant pour les valoriser. Or les représentants de cette catégorie professionnelle sont toujours les hommes. Dans ce travail, quatre femmes représentaient donc quatre façons différentes d’être Capitaine, malgré le fait qu’elles vivaient dans une précarité sociale et sexuelle pour la simple raison d’être femmes. Le dernier tableau vivant montrait toujours une femme, nue cette fois-ci, traînant sur une espèce de chariot funèbre tous les habits portés dans les trois premiers tableaux. La femme et le chariot resplendissaient dans la pénombre de l’espace qui les entourait.

Très souvent les artistes ont du mal à se reconnaître dans les œuvres réalisées dans leur passé ou en début de carrière. Pourtant il me semble que plusieurs thématiques y étaient déjà et que tu continues à les explorer dans tes travaux actuels (par exemple dans les tableaux vivants comme celui réalisé à Venise pour Ca’ Pesaro) : l’analyse sociale, la précarité sociale et sexuelle de la femme, entre autres. Mais tu affirmes que ton travail a beaucoup changé depuis. Comment a-t-il changé ? Toutes les performances que tu as réalisées ont été fondamentales dans l’évolution de ton travail ou bien y en a-t-il une qui a compté plus pour toi ?

Depuis toujours mon travail propose au spectateur une réflexion qui interroge sur la condition du corps dans la société contemporaine. Une approche anthropologique — l’être humain étant au centre de la réflexion — qui analyse inévitablement aussi les aspects les plus sociologiques et politiques du monde contemporain ; ce sont sans aucun doute certaines caractéristiques de mon travail qui se répètent depuis toujours comme une sorte de leitmotiv. Je cherche à raconter et à représenter des problématiques sociales de ceux qui souffrent ou de ceux qui sont des victimes. Tous ces aspects étaient déjà présents dans mon travail et on les retrouve encore aujourd’hui, mais les performances des premières années me semblent plus autobiographiques, plus liées à une gêne personnelle. Il me manque, dans les premières œuvres, une distance permettant de créer un travail de manière plus analytique par rapport au temps présent. Je crois que la trilogie de l’enfermement (La VegliaLa GabbiaLa Pecora) représente le moment où mon travail a fait un pas en avant, où je suis passée d’une histoire personnelle à une histoire anthropologique et sociologique. À la présence du corps s’est ajouté la tridimensionnalité du travail, l’installation dans l’espace au sein de grandes sculptures, ce qui m’a permis de donner plus de poésie à mon œuvre et de sortir de l’aspect souvent dur et violent de la performance.

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