Bertrand Segers : Forme, format et déplacement

Bertrand Segers : Forme, format et déplacement

« Il y a un autre monde, mais il est dans celui-ci », Paul Eluard

 

Pour Bertrand Segers, le contexte est une source de créations, attentif aux détails de la ville et à ses usages. En s’y promenant, à la découverte de lieux et de personnes vers lesquelles montrer ses oeuvres, il ouvre ses boîtes et livre une histoire. Colporteur, il a conçu un système de rangement mobile, des valises et des chariots, des façons de partager autrement la création. Ses projets sont des occasions d’échanges, des situations propices à des expositions, personnelles éphémères. Le titre révèle la fonction, l’histoire et le développement de ses sculptures.

En parallèle, il mène une réflexion sur le statut de l’image comme territoire et support de récit. Celle-ci lui permet de diffuser facilement son travail. De ses performances dans l’espace public, l’image de format 18×24 cm, facile à reproduire et à ranger est devenue sa matrice, règle de jeu. Ce système de contrainte lui offre l’occasion de développer une infinité de possibles. Le format est la matière assemblée dans la sculpture. Document d’archivage, le livret est alors à la fois outil, matière et oeuvre autonome. Dans sa série de dessins bleus lmqp (la maison qui parle), il déploie, déconstruit et duplique la maison. Ils fonctionnent dans la même logique que son travail de sculpture, un arrangement de formes de mêmes dimensions. Entre vue en plan et vue en perspective, ses dessins, réalisés à l’aquarelle au bleu de pastel sur arches, invitent à lire de diverses façons l’architecture. Si la maison pavillonnaire s’apparente ici à un module à combiner, à assembler pour composer de nouvelles formes, chacun peut s’y inventer sa propre histoire. Bertrand Segers crée son système d’archivage et révèle combien le livret peut lui-même être support de mise en espace et d’exposition. Et un caddie, sculpture et objet lui permet de présenter la diversité de ses créations, sous forme de livrets. Ce mobilier, colportage roulant, son outil, provoque des rencontres et des échanges.

Serpent, une sculpture mobile, composée d’un assemblage de planches d’agglo récoltées dans l’espace public, condense les notions de déplacement, de combinaison de formes et de transformation en fonction des contextes. Elle prend sa place, occupe l’espace, tel un corps, un organisme vivant qui s’adapte ou avec lequel se promener et créer des rencontres insolites avec un paysage ou un lieu d’exposition. Ainsi, la question de la mobilité, du territoire et du langage traverse les créations de l’artiste. Il sollicite l’attention aux espaces du quotidien et interroge les limites de représentation de l’espace habité, du mobilier et de l’architecture.

Texte Pauline Lisowski © 2018

 

Bertrand SEGERS
architecte colporteur
GLOSHMOL

Vit et travaille à Vaucresson

www.gloshmol.com

 

Bertrand Segers, Serpent
Bertrand Segers, Serpent