ROMAIN VICARI, SAÚVA-ADA
EN DIRECT / Exposition SAÚVA-ADA de Romain Vicari
jusqu’au 21 février 2021, Chiffonnier Dijon
Dans les présentes pièces de Romain Vicari, des contrastes d’un nouveau genre s’emmêlent et s’allient. Dès le titre choisi par l’artiste, SAÚVA-ADA, se dessinent les deux univers antithétiques de la nature et de la culture qui apparaissent dans la plupart de ses œuvres. Là, les fourmis Saúva (Atta), exemple de société matriarcale de la forêt amazonienne, rencontrent la toute dernière cryptomonnaie Cardano ADA. Deux mots juxtaposés, opposés, mais qui, assemblés, pourraient définir ce que sera l’avenir. Les constructions de l’artiste l’annoncent : l’hybridité doit retrouver sa place ontologique.
Justement, c’est en passant par diverses hybridités que Romain Vicari entend modeler son art, aujourd’hui plus que jamais, en phase avec le temps en pleine mutation que nous traversons. Écartelées entre un réel désir de renouer avec la nature et le constat d’une permanente croissance technologique, les formes qui émergent de la pensée de l’artiste pourraient figurer des divinités contemporaines. Tout droit venu.e.s d’un monde parallèle où les paradoxes habitant le nôtre seraient exacerbés, ces dieux et déesses des téléphones cassés et des pièces égarées sont constitué.e.s dans leur majeure partie à partir de matériaux de récupération. Formes humanoïdes ou robotiques, les œuvres de SAÚVA-ADA sont d’autant plus accolées au contemporain qu’elles ont été pensées in-situ, liées à l’architecture du Chiffonnier et modelées, pour la plupart, pour le lieu. Les socles, point d’ancrage que l’histoire académique a longtemps usé, semblent se détacher des œuvres pour leur laisser une totale autonomie. Loin de l’obligation de la glorification d’antan, l’objet façonné trouve sa liberté en s’émancipant d’une conservation réclamée. Il s’aligne de la main de l’artiste à la réception physique de celui.celle qui l’éprouve, le toise et l’encercle. Tout en proclamant sa relation directe, il annonce sa future disparition. Alors le corps, l’espace et l’art s’ajustent acceptant que tout est voué à une fin, ou plutôt à une évolution qui ne peut maintenir ce qui est dans un état exact.
Texte Sandra Barré
