GWENDOLINE PERRIGUEUX, TOUT FEU TOUT FLAMME

GWENDOLINE PERRIGUEUX, TOUT FEU TOUT FLAMME

Vue exposition Tout feu tout flamme de Gwendoline Perrigueux, SHE BAM! Galerie Lætitia Gorsy, Leipzig Crédit Photos: Jamal Cazare

EN DIRECT / Exposition Tout feu tout flamme de Gwendoline Perrigueux
jusqu’au 4 septembre 2021, SHE BAM! Galerie Lætitia Gorsy, Leipzig

Par Ingrid Luquet-Gad

Nous arrivons trop tard. Le constat tombe comme un couperet, et à première vue, tout concourt à l’empeser de la douce mélancolie des fins : fin de partie, fin de siècle, clap de fin. Et pourtant, c’est une libération. Quelque chose, à nouveau, s’entr’ouvre, qui électrise l’atmosphère de possibles. Il en va de germinations silencieuses et de frissons retenus encore tapis dans l’ombre des possibles. Car si l’époque est tout entière placée sous le signe de l’accélération temporelle, de la surenchère visuelle et de la stratégie du choc, ses issues désirantes et créatives, ses énergies émancipatrices et collectives, se trouvent précisément dans la capacité à faire sourdre d’une fin les mille possibles joyeusement indéfinis.

Les artistes, les danseur.se.s et les âmes libres le savent bien, occupés qu’iels sont à faire tomber plus vite la nuit ; cette nuit où il est encore possible d’étirer le temps à l’infini, de tracer des boucles serpentines et de se vivre ensemble comme constellation. Tel serait le désir, et le paysage, dessiné par les sculptures et les installations de Gwendoline Perrigueux : chez elle, tout part souvent d’une fête, de son énergie sensuelle et de ses rencontres aléatoires. Cette fête-là, nous autres, invité.e.s à pénétrer au sein de ses environnements immersifs, nous n’y avons pas assisté. Peu importe, car ce que l’artiste nous adresse, c’est précisément quelque chose comme son essence brute : ses vestiges incantatoires et ses constellations gestuelles, inscrits au cœur de formes indicielles laissées ouvertes à notre propre activation.

Pour Tout feu tout flamme, sa première exposition solo à la galerie She BAM! à Leipzig, Gwendoline Perrigueux est venue peindre les sols et les murs de la même tonalité pourpre. L’espace devient matière, il palpite et se fait chair. Au sein de ce territoire, l’artiste décline sa palette de matériaux fétiches : le métal, la céramique, le cuir et le néoprène. Défiant la gravité, une sculpture centrale est composée de deux plaques d’acier frêles comme des feuilles élégamment courbées. Perforées d’œillets noirs, un élément formel récurrent chez l’artiste, des rubans en métal couleur chair s’en échappent de manière à dessiner autour d’elle des ondoiements serpentins.

Il en va pour nos tou.te.s d’un appel à se rendre léger.e.s, à arpenter l’intervalle en engageant un corps délesté de ses impératifs gestuels quotidiens. Tout reste encore à inventer, et la perception à réengager, alors qu’au mur, des structures à la géométrie baroque et paradoxale se convulsent à leur tour. Façonnées en céramique, elles sont maintenues en lévitation par un réseau d’attaches en néoprène dont le câblage traverse des murs-matière dès lors rendus poreux.

Empreinte d’une matériologie extatique, l’installation darde ses rayons en tous sens. A mi-chemin entre les appâts ultra-glamour d’une Sylvie Fleury et les dispositifs de plaisir contraint d’un Fabrice Gygi, les sculptures de Gwendoline Perrigueux appellent un corps absent suggéré par ses modes d’apparat et d’apparition. Chez elle cependant, l’attachement à un faire manuel prend le pas sur les ready-made aidés de ses aînés, témoignant d’un constat générationnel.

Ainsi, plutôt que de réorienter les signes capitalistes du monde post-industriel vers le champ du plaisir, l’artiste réaffirme la volonté de s’en détacher entièrement. La fête, cette fête finie ou peut-être simplement en attente d’activation, est une promesse d’émancipation. Elle est ce seuil où tout peut basculer, la communauté des corps se reformer, les mondes alternatifs s’inventer – par toute une palette d’affects encore troubles qui jusqu’à nous s’avancent masqués pour mieux nous traverser.

Ingrid Luquet-Gad, Juillet 2021

Vue exposition Tout feu tout flamme de Gwendoline Perrigueux, SHE BAM! Galerie Lætitia Gorsy, Leipzig Crédit Photos: Jamal Cazare
Vue exposition Tout feu tout flamme de Gwendoline Perrigueux, SHE BAM! Galerie Lætitia Gorsy, Leipzig
Crédit Photos: Jamal Cazare
Vue exposition Tout feu tout flamme de Gwendoline Perrigueux, SHE BAM! Galerie Lætitia Gorsy, Leipzig Crédit Photos: Jamal Cazare
Vue exposition Tout feu tout flamme de Gwendoline Perrigueux, SHE BAM! Galerie Lætitia Gorsy, Leipzig
Crédit Photos: Jamal Cazare
Vue exposition Tout feu tout flamme de Gwendoline Perrigueux, SHE BAM! Galerie Lætitia Gorsy, Leipzig Crédit Photos: Jamal Cazare
Vue exposition Tout feu tout flamme de Gwendoline Perrigueux, SHE BAM! Galerie Lætitia Gorsy, Leipzig
Crédit Photos: Jamal Cazare
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Crédit Photos: Jamal Cazare
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Crédit Photos: Jamal Cazare
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Crédit Photos: Jamal Cazare
Vue exposition Tout feu tout flamme de Gwendoline Perrigueux, SHE BAM! Galerie Lætitia Gorsy, Leipzig Crédit Photos: Jamal Cazare
Vue exposition Tout feu tout flamme de Gwendoline Perrigueux, SHE BAM! Galerie Lætitia Gorsy, Leipzig
Crédit Photos: Jamal Cazare