[ENTRETIEN] Maryline Brustolin, directrice de la Galerie Salle Principale

[ENTRETIEN] Maryline Brustolin, directrice de la Galerie Salle Principale

Située dans le XIXème arrondissement parisien, la galerie Salle Principale est une galerie atypique dont le visiteur ne ressort pas indemne. Nous sommes allés à la rencontre de sa directrice et fondatrice, Maryline Brustolin, afin qu’elle nous parle du concept de la galerie et de sa ligne directrice.

Maryline Brustolin, pouvez-vous nous parler de votre parcours et nous dire quelle ambition vous anime ?
J’ai suivi un parcours dans l’art contemporain. Très jeune, je voulais monter une galerie d’art. La vie m’a entrainée sur un autre projet durant 12 ans consacré à des thèmes connexes à l’art contemporain que sont l’architecture et le design. Puis j’ai décidé de quitter cette société, qui au demeurant marchait très bien, pour monter une galerie. Mon désir a toujours été d’accompagner des artistes et de montrer leur regard.

Quels sont les sujets que vous développez dans votre programmation ?
Ils traitent de la société, de la politique, ils sont liés à l’humain. Les propos des artistes doivent être associés au mien afin qu’ensemble nous puissions amener une réflexion. J’ai ouvert la galerie avec cette envie très précise de parler de sujets qui me touchent. Un galeriste émet par ses choix un avis et une position qu’il doit soutenir et défendre.

C’est une position qui peut faire penser à celle d’un centre d’art contemporain ?

En invitant les artistes, je leur propose de parler de sujets bien particuliers et je les mets dans une position qui les change des galeries conventionnelles. Souvent, exposer dans une galerie est le fruit d’un résultat, d’un long travail en atelier de production d’œuvres que le galeriste présente dans son espace. Or je ne souhaite pas forcément exposer un « produit fini » mais plutôt l’élaboration d’une pensée. Ma conception de la galerie est plutôt dans l’accompagnement d’un artiste, dans sa démarche. J’ai d’ailleurs pas mal d’échos de gens qui voient en cette galerie un lieu qui se rapproche par sa programmation d’un centre d’art contemporain. Sans doute parce que j’introduis une réflexion approfondie sur le monde dans lequel nous vivons.

L’agencement de la galerie lui-même semble participer au propos des expositions…
J’ai ouvert en septembre 2014. J’ai voulu démarrer avec Patrick Bouchain une figure essentielle selon moi de l’architecture. J’apprécie dans son travail le fait qu’il interroge les situations et qu’il rende apparent tout son processus de création. J’ai ouvert la galerie dans un lieu nouveau pour lequel il a tout de suite réagi et m’a proposé de « se rendre utile » en l’aménageant gracieusement. Il m’a demandé comment je concevais le fonctionnement de la galerie. Je lui ai répondu que pour moi chaque exposition serait un renouvellement et un réaménagement pour que les artistes puissent occuper l’espace à la manière dont ils le voulaient. Il m’a proposé des panneaux de bois semblables à des cimaises mobiles comme il en existe dans les théâtres. Ainsi à chaque exposition, l’espace est transformé et cela correspond tout à fait à ma vision de la galerie.

Patrick Bouchain travaille sur les espaces interstitiels du tissu urbain. La galerie est-elle pour vous, à sa manière, un espace de réflexion au sein d’un environnement fonctionnel ?
Tout est lié. Patrick Bouchain s’intéresse aux zones délaissées, son regard est plutôt porté vers la banlieue. Il y a une cohérence car comme lui je suis quelqu’un qui s’inscrit dans le concret et le réel. La galerie est positionnée dans un quartier du 19ème arrondissement de Paris en pleine transformation, sur l’axe qui mène à Pantin. Elle est située non loin des galeries de Belleville, du Frac île-de-France (Le Plateau) tout en étant dans une zone où il n’y a pas d’autres galeries.

Une situation géographique due à une volonté de votre part ou au hasard ?
C’est véritablement un choix. Mon modèle n’est pas parisien.  J’aime voir des choses qui sont décloisonnées. Ma pratique des expositions, mes déplacements font que j’ai plus de plaisir à aller en extérieur, dans des lieux où je peux rester plus longtemps, plutôt que de me rendre dans un endroit précis à la programmation régulière. La galerie est positionnée entre le parc très aéré de Buttes-Chaumont et le Canal de l’Ourcq, une situation en quelque sorte entre terre et eau, proche d’éléments naturels et vivants. Elle est dans un Paris plus contemporain, plus dynamique, plus ouvert à la mixité des populations. J’ai aimé être dans un rapport de découverte de l’autre. J’ai eu l’opportunité de visiter un espace dans le Marais que j’aurai pu choisir pour la galerie mais je savais que j’aurai dû y montrer des travaux plus établis et me positionner différemment. Ici, je me sens plus à l’aise pour l’expérimentation.

L’espace de la galerie est lui aussi comme ce nouveau Paris, très contemporain.
Je suis dans un espace qui a une architecture contemporaine. C’est aussi très important pour moi. Le bâtiment a été conçu par l’agence Lacaton & Vassal, qui a entre autre réhabilité le Palais de Tokyo, et qui vient de livrer récemment le Frac de Dunkerque. Avec sa façade entièrement vitrée, il n’y a pas de cloisonnement mais au contraire une ouverture totale sur l’extérieur. Les artistes que j’invite sont d’ailleurs très réactifs à cet aspect de la galerie.

Galerie : Salle Principale, 28 rue de Thionville 75019 Paris

En cours : D’une main invisibleexposition collective du 20 mai au 25 juillet l Salle Principale, Paris l Annie Vigier et Franck Apertet (les gens d’Uterpan), Stéphane Barbier Bouvet, Patrick Bouchain, Anne Lacaton et Jean Philippe Vassal, Dominique Mathieu, Nils Holger Moormann, Matthieu Saladin, Lois Weinberger

A venir : Stand I never read du 17 au 20 juin 2015, Art Book Fair Basel l Annie Vigier et Franck Apertet (les gens d’Uterpan) // Salle Principale, Gallery, Paris